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Billet de blog n° 369. Au sein des entreprises ayant souscrit un prêt garanti par l’État durant la crise sanitaire, 10% ont choisi de le rembourser en intégralité un an après l’obtention. En revanche, 73% ont opté pour un remboursement sur la durée maximale. Ce billet de blog explore les choix de remboursement (différé, in-fine, durée d’amortissement, etc.) en lien avec la taille et la santé financière des entreprises. Les petites entreprises choisissent d’étaler leur remboursement dans le temps, sauf si elles détenaient des liquidités abondantes avant la crise, alors que les ETI ont été plus nombreuses à rembourser immédiatement ou avec un décalage d’un an. À fin juin 2024, 62% des montants octroyés ont été remboursés.
En 2020, face au risque sanitaire, un confinement a été mis en place. Dès lors, les entreprises ont vu leurs entrées de trésorerie s’effondrer. Leurs dettes restant exigibles, les entreprises ont recherché des liquidités : que ce soit en tirant sur leurs lignes de crédit disponibles (Vinas, 2020) ou en souscrivant aux prêts garantis par l’État (« PGE Covid ») mis en place pour répondre aux besoins de liquidité. Les entreprises ont très largement accédé à ce prêt, mais, ex post, toutes en avaient-elles besoin ? Souscrire un PGE n’était-il pas une opportunité de financement à faible coût pour des entreprises contraintes financièrement ? Rembourser rapidement un PGE était-il un signe de bonne santé financière adressé au marché ?
En examinant le chiffre d’affaires des entreprises entre 2019 et 2021, on note que les entreprises ayant remboursé en intégralité leur PGE dès la première date anniversaire ont eu un taux de croissance plus important que celles qui ont choisi de conserver leur prêt (graphique G2). Au-delà de la dynamique du chiffre d’affaires, d’autres facteurs ont-ils affecté le choix de remboursement ?
Dans ce billet de blog, nous analysons les choix de remboursement des PGE en comparant les caractéristiques des entreprises qui ont remboursé immédiatement et en intégralité leur PGE un an après l’octroi à celles qui ont décidé de le rembourser progressivement.
Les PGE : un dispositif de soutien souple aux modalités de remboursement variables
Les « PGE Covid » offraient des conditions financières très favorables. Outre une tarification avantageuse, aucun remboursement n'était exigé la 1ère année. Puis, un an après l’octroi, l’entreprise pouvait décider : (i) de le rembourser immédiatement dans son intégralité, (ii) de commencer à le rembourser sur une période allant de 1 à 5 ans, ou (iii) de différer le début du remboursement d’une année supplémentaire et de l’étaler sur une période allant de 1 à 4 ans.
143 Mds euros de PGE ont été octroyés. Nous avons exclu de l’analyse les grandes entreprises ainsi que les holdings, les secteurs de l’agriculture, de l’enseignement et les activités financières. Notre échantillon contient 579 778 bénéficiaires de PGE Covid, soit un encours de 105 Mds euros (73% du total).
Les petites entreprises choisissant de rembourser leur PGE immédiatement en intégralité sont entrées dans la crise Covid avec davantage de liquidité
La décision de rembourser immédiatement et en intégralité son prêt un an après l’octroi dépend d’un grand nombre de facteurs. Nous observons que la taille est un déterminant : seules 10% des microentreprises et très petites entreprises (TPE) choisissent de rembourser l’intégralité de leur PGE en 2021 contre 15% des moyennes entreprises (ME) et 26% des entreprises de taille intermédiaires (ETI) ainsi que le montre le graphique G3.
Par ailleurs, la situation en termes de trésorerie à la veille du confinement de mars 2020 est susceptible d’influencer cette décision. Nous observons ainsi (graphique G3) que la trésorerie médiane à fin 2019 est plus élevée pour les entreprises choisissant de rembourser leur prêt immédiatement et en intégralité que pour celles choisissant de le rembourser progressivement, avec ou sans différé d’un an.
Nous notons également que non seulement la position de trésorerie constitue un élément discriminant pour les petites entreprises mais aussi que la trésorerie des entreprises remboursant immédiatement et en intégralité est, en nombre de jours de CA, significativement plus importante pour les PME que pour les ETI.
Plus l’entreprise est petite, plus elle étale son remboursement dans le temps
Un an après la souscription d’un PGE, c’est-à-dire au printemps 2021 pour la majorité des PGE, si l’entreprise a décidé de ne pas rembourser son prêt immédiatement et en intégralité, elle doit choisir la durée d’amortissement (jusqu’à 5 ans). Elle peut cependant différer ce remboursement d’un an supplémentaire : dans ce cas-là le remboursement se fait sur 1 à 4 ans (au plus) pour rester dans la limite des 6 ans après la date d’octroi (voir Graphique G1).
Ce choix de différer le début du remboursement est fréquemment fait parmi les firmes n’ayant pas remboursé intégralement un an après l’octroi du prêt. Il est cependant davantage privilégié par les plus grandes des entreprises considérées ici : 72% des ETI ont fait le choix de différer un PGE, contre 62% des microentreprises. Et cette relation entre le choix de différer le remboursement et la taille de l’entreprise est linéairement croissante avec la taille (graphique G4).
Cette préférence moins marquée des plus petites entreprises pour le différé peut être liée à une volonté de lissage du remboursement dans le temps. On observe d’ailleurs que, parmi les entreprises qui n’ont pas intégralement remboursé en 2021 et ont choisi de ne pas différer le remboursement en 2022, les petites entreprises sont plus promptes à choisir une durée de remboursement longue : plus de 90% d'entre elles choisissent une durée de remboursement supérieure ou égale à 3 ans contre « seulement » 83% des ETI (graphique G4). Parmi les entreprises ayant choisi de différer leur remboursement, on retrouve un ordonnancement similaire, mais des écarts entre taille moins marqués.
Enfin, l’entreprise peut choisir un remboursement in fine. Ce choix est essentiellement pris par les plus grandes des entreprises considérées ici : 32% des ETI choisissent de rembourser in-fine, contre 20% des ME, 16% des PE, 13% des TPE et 11% des microentreprises. Là-aussi ce choix peut s’interpréter comme une volonté de lisser l’effort dans le temps pour les plus petites entreprises ; il peut aussi être lié à une complexité plus élevée dans la gestion de ce type de prêt.
À l’heure actuelle, le remboursement des PGE ne soulève pas d’inquiétudes particulières : à fin juin 2024, 62% des montants octroyés ont été remboursés et cette proportion est la même quelle que soit la taille d’entreprise. Les appels en garantie s’élèvent à cette date à 4,3 Mds euros, soit 3% du total octroyé.
Des « PGE résilience » d’une ampleur plus limitée
À partir de 2022, l’économie française a subi les conséquences de l’augmentation du coût de l’énergie. L’octroi des PGE Covid s’étant achevé fin 2022 et les « PGE résilience » ont pris le relai entre avril 2022 et décembre 2023. Mais ces PGE ont été octroyés selon des critères plus stricts et à des taux plus élevés que les PGE Covid. Seules 3 334 entreprises en ont bénéficié pour un encours de 2 Mds d’euros. Parmi ces bénéficiaires, 62% avaient déjà souscrit un PGE Covid, que seuls 145 avaient choisi de rembourser intégralement en 2021.
Est-il possible que les PGE Covid aient en partie joué le rôle de coussin de liquidité lors de la crise énergétique ? Si nous examinons le taux de croissance médian du chiffre d’affaires réel entre 2021 et 2023, contrairement à ce qui avait été observé entre 2019 et 2021, il apparaît que les entreprises qui ont décidé de rembourser progressivement leur PGE Covid affichent une plus forte dynamique de chiffre d’affaires sur la période 2021-2023 que celles ayant décidé de le rembourser dès 2021 (graphique G5).
Il est probable que cette hausse s’explique en partie par un effet rattrapage. Mais cette observation questionne aussi sur le rôle joué par les PGE Covid durant la crise énergétique : le fait de conserver un PGE a-t-il donné de la souplesse financière aux entreprises en 2022 ? Une analyse plus minutieuse dépassant le cadre de ce blog serait nécessaire pour étudier cette question.
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Mise à jour le 21 Octobre 2024