Document de travail

La concurrence étrangère le long de l'échelle de qualité

Mise en ligne le 23 Décembre 2024
Auteurs : Gabriel Smagghue, Paul Piveteau

Document de travail n°979. Nous montrons que les entreprises proposant des produits à bas prix sont davantage affectées par la concurrence à bas coût. Pour expliquer ce phénomène, nous proposons un modèle empirique du commerce intégrant une demande à coefficients aléatoires et une qualité des produits endogène. Contrairement aux systèmes de demande couramment utilisés (par ex. CES, logit imbriqué), ce modèle génère des schémas de substitution riches et implique un effet d’ « évasion de la concurrence » : face à la concurrence à bas coût, les entreprises sont incitées à améliorer la qualité de leurs produits. L’estimation du modèle révèle une hétérogénéité significative dans les préférences des consommateurs. Les expériences contrefactuelles suggèrent que le « choc chinois » a eu un impact particulièrement dommageable sur les entreprises situées en bas de la distribution des prix et que l'amélioration de la qualité a joué un rôle limité pour atténuer ce choc.

Effect of the China Shock along the Price Distribution of French Firms

Image WP979
Note: The figure illustrates the differential impacts of the China shock on French firms across price deciles (1 is the lowest price level category, 10, the highest category, taken as reference). It highlights the role of quality upgrading and markup adjustments in mitigating competitive pressures. The y-axis is in log-change.

Au cours des deux dernières décennies, l’intégration rapide de pays à bas coûts comme la Chine dans l’économie mondiale a profondément affecté les entreprises manufacturières des pays développés. Alors que les consommateurs ont bénéficié d’une plus grande variété de produits à des prix plus bas, les pressions concurrentielles ont touché de manière disproportionnée les entreprises produisant des biens à faible coût. Cet article examine comment les entreprises françaises ont navigué face à cette vague de concurrence, en se concentrant particulièrement sur leurs ajustements de prix et de qualité des produits en réponse à ces défis.

L’étude révèle que les entreprises produisant des biens à faible coût ont subi les pertes les plus importantes en termes de parts de marché et de profits en raison de la montée des importations chinoises. Ces entreprises s’adressent souvent à des consommateurs sensibles aux prix, plus enclins à se tourner vers des alternatives étrangères moins chères. À l’inverse, les entreprises produisant des biens de meilleure qualité et à des prix plus élevés ont été moins touchées, bénéficiant d’une clientèle plus stable prête à payer un supplément pour une différenciation.

Un mécanisme important exploré dans l’étude est la stratégie de montée en gamme. Certaines entreprises ont réagi à l’augmentation de la concurrence en améliorant la qualité de leurs produits et en ciblant des consommateurs moins sensibles aux prix. Cependant, l’étude montre que, bien que la montée en gamme ait permis d’atténuer certains des impacts négatifs de la concurrence, elle n’a pas pu compenser entièrement les pertes, en particulier pour les entreprises positionnées sur les segments de prix bas. Les coûts associés à la production de biens de meilleure qualité ont limité l’efficacité de cette stratégie.

Ces résultats ont des implications politiques importantes. Soutenir l’innovation et faciliter la montée en gamme pourrait aider les entreprises nationales à rester compétitives face à la mondialisation. Des politiques encourageant les entreprises à différencier leurs produits par une meilleure qualité pourraient réduire leur vulnérabilité face à la concurrence à bas coût.

Mots-clés : concurrence à bas coût ; préférences mixtes ; amélioration de la qualité
JEL classification: E52, E58, D83
 

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Mise à jour le 23 Décembre 2024