Nous étudions l'importance pour les marchés financiers de diverses dimensions de la communication de la BCE et de l'Eurosystème. En particulier, nous considérons la communication en dehors des jours de réunion de politique monétaire (communication outside of monetary policy meeting days ou CoMPD), composée des interventions (i) des présidents de la BCE, (ii) des autres membres du directoire de la BCE (EB), (iii) des membres du conseil des gouverneurs de la BCE représentant les banques centrales nationales (BCN) française, allemande, italienne et espagnole, et (iv) les auditions du président de la BCE par le Parlement européen. Nous examinons également en quoi les mouvements des marchés en réaction à ces types de communication sont comparables aux mouvements lors des jours de réunion de politique monétaire.
À cette fin, nous construisons une base de données d'études d'événement sur la communication en zone euro (Euro Area Communication Event-Study Database ou EA-CED) contenant les variations quotidiennes et intra-journalières de plusieurs variables financières autour de différents événements de communication de la BCE/Eurosystème. Cette base de données offre de nombreuses possibilités d'étudier l'effet de la communication des banques centrales (y compris les annonces de politique monétaire) sur les marchés financiers.
Nous montrons d'abord que les événements de communication de la BCE et de l'Eurosystème sont fréquents en dehors des jours de réunion de politique monétaire. En particulier, nous observons que ces événements ont augmenté pendant la crise financière de 2007-2008, atteignant un pic en 2013, année où la BCE a introduit la forward guidance sur les taux d'intérêt directeurs. Il est intéressant de noter que le président de la BCE a prononcé moins de discours depuis la crise financière, alors que le nombre de prises de parole des autres membres du conseil des gouverneurs a augmenté au fil des ans.
Deuxièmement, en utilisant une approche d'étude d'événement sur des données quotidiennes, nous documentons que la CoMPD est associée à des mouvements significatifs sur les taux OIS Eonia, les rendements des obligations souveraines, et les anticipations d'inflation de marché à différentes maturités. En ce qui concerne le type d'orateur, nous trouvons que les discours du président de la BCE ont l'effet le plus fort sur les mouvements quotidiens. Cependant, nous constatons également qu'il existe une différence entre l'effet de la CoMPD avant et après la crise financière mondiale. Dans la période précédant la crise, c'est principalement la communication des gouverneurs des BCN et des autres membres du directoire de la BCE qui fait bouger les marchés. Dans la période post-crise, c'est surtout la communication du président de la BCE.
En outre, nous étudions les interventions qui ont lieu dans les quelques semaines précédant les réunions de la BCE où il y a eu des changements de politique monétaire pour un assouplissement ou pour un resserrement. Nous constatons que les taux OIS Eonia sur les maturités courtes diminuent les jours de discours des présidents de la BCE précédant les réunions ayant conduit à un assouplissement. En revanche, les taux OIS Eonia à moyen et long terme augmentent avant les décisions de resserrement. La couverture médiatique de ces discours par Bloomberg corrobore nos résultats, en révélant que certaines des remarques faites lors de ces événements contiennent un signal clair sur la décision de politique monétaire à venir. Enfin, une analyse intra-journalière des événements de CoMPD met en évidence des mouvements systématiques des taux OIS Eonia en utilisant de courtes fenêtres de temps autour des discours des présidents de la BCE, en accord avec l'analyse quotidienne.
Dans l'ensemble, nos résultats confirment l'importance de la communication des banques centrales pour les mouvements des marchés financiers et soulignent l'importance de prendre en compte la communication en dehors des jours de réunion réguliers pour comprendre la transmission de la politique monétaire. Cela suggère que les analyses qui ne considèrent que les annonces faites pendant les jours de réunions de politique monétaire pour identifier les chocs ou les surprises de la politique monétaire devraient être étendues pour intégrer les signaux qui proviennent de la communication des responsables de la BCE en dehors de ces jours.