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Deux éclairages d’actualité concernant la stabilité des prix et la stabilité financière
Intervenant
François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France
Mise en ligne le 13 Septembre 2024
Eurofi – 13 septembre 2024
Discours de François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France
Mesdames et Messieurs,
Je souhaite tout d’abord remercier chaleureusement David Wright et Didier Cahen pour l’organisation une fois de plus de cet impressionnant événement Eurofi qui se tient cette fois dans la magnifique ville de Budapest, et de me permettre exceptionnellement de m’exprimer à distance. Je voudrais brièvement partager avec vous quelques éclairages d’actualité concernant deux sujets : la décision de politique monétaire que nous avons prise hier, et la dernière proposition des États-Unis sur Bâle 3.
I. Une décision de politique monétaire évidente, mais importante
Nous avons décidé hier d’une deuxième baisse des taux. Notre Conseil des gouverneurs dirigé par Christine Lagarde a pris une décision unanime, car soutenue solidement par les données économiques. L’inflation évolue selon notre projection, que nous n’avons pas modifiée d’une seule décimale (pour la première fois depuis presque 20 trimestres) : nous sommes à 2,2 % en août, et nous devrions atteindre 2 % de manière durable d’ici à la seconde moitié de l’année prochaine. De plus, les anticipations du marché concernant l’inflation – qu’il s’agisse du fixing ou du marché des options – sont aujourd’hui bien au-dessous de notre propre prévision, mais l’avenir dira ce qu’il en est.
S’agissant de l’activité, les dernières données sont quelque peu décevantes, la croissance résultant principalement des exportations nettes et de la consommation publique, tandis que la demande intérieure privée a faibli. La forte incertitude et la faible confiance continuent de favoriser l’épargne plutôt que la consommation des ménages ou l’investissement des entreprises. À ce propos, la Banque de France publiera ses prévisions pour la France le 17 septembre, et au-delà de l’impulsion ponctuelle donnée par le succès des Jeux olympiques, elles devraient être cohérentes avec cette perspective d’une reprise très progressive.
Ainsi, notre décision procède également d’une gestion saine des risques. À la différence des États-Unis, notre mandat n’est pas double (stabilité des prix /plein emploi), mais il est clairement symétrique autour de notre cible de 2 % : nous devons être attentifs au risque de manquer notre cible par le bas tout autant qu’à celui de la dépasser.
Ce n’était pas notre première baisse des taux, et ce ne sera pas la dernière. D’où la question fréquemment posée : quelle sera la suite ? Nous avons dit clairement que nous déciderons réunion par réunion, en nous fondant sur les données – au-delà de la possible volatilité des prochains chiffres mensuels et en incluant des indicateurs avancés. En d’autres termes : la direction est claire – nous devrions continuer à réduire progressivement, et de façon appropriée, le caractère restrictif de notre politique monétaire. Mais le rythme doit être très pragmatique : nous ne nous engageons pas à l’avance sur une trajectoire de taux particulière, et nous conservons toute notre optionalité pour nos prochaines réunions. Soyez assurés quoi qu’il en soit de notre ferme détermination, et même de notre engagement, à ramener durablement l’inflation à 2 % au cours de l’année prochaine. Je voudrais ajouter une chose : les Européens ne doivent pas compter exclusivement sur la politique monétaire pour remédier au sérieux défi de croissance auquel ils sont confrontés : d’où notre appel clair hier à ne pas enterrer les rapports de Mario Draghi et Enrico Letta et leurs propositions de réformes absolument indispensables du côté de l’offre – qui, pour la plupart, ne sont pas coûteuses budgétairement.
II. S’agissant de Bâle 3, une clarification graduelle de la part des États Unis
Permettez-moi tout d’abord de saluer les clarifications apportées plus tôt cette semaine par le vice-président de la Fed, M. Barr, concernant la proposition américaine révisée de « Basel endgame » et, plus important encore, leur engagement réitéré de mettre en œuvre le paquet Bâle 3. Cela est de bon augure pour la stabilité financière.
Toutefois, à ce stade nous n’en connaissons pas le contenu précis, qui doit encore être adopté par les trois agences fédérales. La proposition initiale des États Unis, publiée en juillet 2023, contenait en effet certaines dispositions surtransposant (gold plating) les règles de Bâle. Ces dispositions devraient être largement et légitimement supprimées dans cette nouvelle version. Cela dit, le Comité de Bâle prêtera une attention particulière aux règles précises à venir. S’agissant de certains domaines des risques, en particulier le risque de marché et le risque opérationnel, et de certaines des orientations récemment annoncées comme étant un « aperçu » de la réforme finale, il conviendra d’examiner si elles risquent de s’écarter des normes bâloises. Le champ d’application des règles révisées pourrait constituer un point d’intérêt supplémentaire, en particulier pour les banques de taille moyenne dont les bilans sont compris entre 100 et 250 milliards de dollars.
Enfin, le calendrier doit être clarifié rapidement, afin de réduire autant que possible le décalage temporel dans l’application entre les principales juridictions : ceci concerne également le Royaume-Uni. Comme vous le savez, dans l’Union européenne les règles issues de Bâle 3 commenceront à s’appliquer à partir de janvier 2025, mais avec une adaptation importante et justifiée : la proposition de la Commission de repousser à janvier 2026 la mise en œuvre du FRTB (Fundamental Review of the Trading Book) sur les risques de marché.
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Les deux sujets que je viens de traiter sont liés, en effet : notre mission en tant que banque centrale est de rétablir la stabilité des prix tout en préservant la stabilité financière. Atteindre ces deux objectifs à la fois n’a jamais été considéré comme simple, souvenez-vous des craintes qui persistaient encore début 2023 ; mais nous avons réussi jusqu’à présent, et ce n’est pas dû au hasard mais au fait que les banques sont désormais plus sûres grâce à Bâle. Les banques européennes sont également très sensibles à la compétitivité, à juste titre : mais sécurité et compétitivité ne sont pas contradictoires, au contraire. Soyez assurés que nous serons à présent de plus en plus attentifs à assurer leur compatibilité. Je vous remercie de votre attention.
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Mise à jour le 18 Septembre 2024