La question de la vie chère demeure au cœur des préoccupations dans les territoires ultramarins, comme en témoigne la mobilisation de septembre 2024 en Martinique. Ces revendications ont mis en lumière une série d’entraves structurelles qui affectent le pouvoir d’achat et l’économie de ces territoires. L’un des leviers identifiés dans le « protocole de lutte contre la vie chère » consiste à renforcer les échanges commerciaux avec les pays voisins. Cet objectif suppose toutefois de mieux comprendre la situation actuelle des Outre-mer en matière de commerce extérieur et les marges de progression envisageables.
Cet article vise à caractériser les échanges internationaux des économies ultramarines françaises, à les comparer à ceux de leurs environnements régionaux, puis à estimer, à l’aide d’un modèle de gravité, les potentiels inexploités de commerce dans certains secteurs, ou à destination de certains marchés.
1 La géographie, contrainte majeure à l’internationalisation
Les espaces géographiques des Outre-mer sont composés en grande majorité de petits États insulaires en développement (PEID) qui sont confrontés à un certain nombre de défis communs contraignant leur accès aux marchés internationaux. Ils se caractérisent par l’étroitesse de leur marché intérieur qui ne leur permet pas d’exploiter de possibles économies d’échelle, limitant leur capacité à développer une production industrielle compétitive. À cela s’ajoutent leur éloignement géographique des grands pôles économiques mondiaux et un faible niveau de connexion aux grandes lignes maritimes qui entravent leur intégration aux chaînes de valeur mondiale.
À l’instar d’autres PEID, les Outre-mer concentrent leurs exportations sur un nombre restreint de produits (Chen et al., 2014 ; Didier, 2014), comme illustré par le graphique 1. Les territoires qui disposent de ressources naturelles abondantes se spécialisent dans ces ressources. Ainsi, les exportations de la filière nickel représentent la quasi-totalité des exportations de la Nouvelle-Calédonie, et l’or une part importante de celles de la Guyane française. De nombreuses économies exploitent leurs avantages comparatifs dans les secteurs agricole et agroalimentaire. C’est le cas de La Réunion (60 % de ses exportations), de la Martinique (39 %) et de la Guadeloupe (37 %) avec les exportations de sucre de canne pour ces trois territoires et de bananes et de rhum pour les Antilles. En Polynésie française, plus de la moitié des exportations concernent les produits de la perliculture. La présence d’une raffinerie en Martinique ou d’installations de stockage explique également les exportations de produits minéraux vers la zone des Antilles.