Point sur la conjoncture économique française à début septembre 2022
Dans un environnement économique toujours très difficile et incertain (crise énergétique, difficultés d’approvisionnement et de recrutement), l’activité continue globalement de résister.
Selon les chefs d’entreprise participant à notre enquête (environ 8 500 entreprises ou établissements interrogés entre le 29 août et le 5 septembre), l’activité au mois d’août a progressé, légèrement dans l’industrie et plus nettement dans les services marchands couverts par l’enquête, elle est en revanche quasi stable dans le bâtiment.
- Pour le quatrième mois consécutif, les difficultés d’approvisionnement se tassent, cette fois plus nettement.
- Elles restent néanmoins élevées dans l’industrie (51 % en août, après 57 % en juillet) et le bâtiment (43 %, après 48 %).
- La hausse des prix des produits finis ralentit. Les difficultés de recrutement s’établissent à un niveau encore élevé (57 %, après 58 %).
- Pour le mois de septembre, notre indicateur d’incertitude repart à la hausse ; les chefs d’entreprise remontent leurs inquiétudes quant à la problématique énergétique (prix et disponibilité) et au comportement déconsommation des ménages, en lien avec l’inflation.
- L’érosion des carnets de commande dans le bâtiment et de certaines trésoreries constituent également des signaux de vigilance pour les prochains mois.
Dans ce contexte, les chefs d’entreprise anticipent néanmoins une légère progression de l’activité en septembre. Après un premier trimestre 2022 marqué par la vague épidémique Omicron et le début de la guerre en Ukraine, la croissance s’est montrée plus dynamique que prévu au deuxième trimestre, pour atteindre 0,5 % par rapport au trimestre précédent. Après avoir été stable en juillet, le PIB augmenterait en août puis en septembre.
Dans un contexte toujours très incertain, nous estimons à ce stade que la progression du PIB pour le troisième trimestre 2022, par rapport au trimestre précédent, pourrait s’établir autour de + 0,3 %.
1. En août, l’activité progresse légèrement dans l’industrie, plus nettement dans les services marchands ; elle est quasi stable dans le bâtiment
En août, alors que les chefs d’entreprise avaient anticipé une contraction le mois dernier, l’activité progresse légèrement dans l’industrie. Les évolutions sont toutefois contrastées selon les secteurs.
Les soldes d’opinion relatifs à la production en août indiquent une progression de l’activité dans les produits informatiques, électroniques et optiques, dans l’habillement, textile, chaussures, et autres produits industriels. À l’inverse, dans les industries chimique, pharmaceutique, et le bois, papier, imprimerie, l’activité s’inscrit en net recul par rapport au mois précédent. Dans l’agro-alimentaire, dont l’activité progresse légèrement, les chefs d’entreprise ne mentionnent pas à ce stade d’impact significatif des mauvaises conditions climatiques (e.g. sécheresse) sur la production au cours du mois d’août.
Dans l’ensemble de l’industrie, le taux d’utilisation des capacités de production progresse légèrement et se situe à 80 % en août. Dans la plupart des secteurs, il se situe au-dessus de sa moyenne historique, à l’exception principale - de l’aéronautique et autres transports (écart de – 4 points). Il est ce mois-ci supérieur à sa moyenne de long terme dans l’automobile, à la faveur du rebond d’activité lié à l’approvisionnement en semi-conducteurs.
Dans les services marchands, l’activité progresse de nouveau en août, à un rythme plus élevé que celui anticipé par les chefs d’entreprise le mois dernier. Ce regain de dynamisme concerne la plupart des services aux particuliers (notamment restauration, activités de loisirs). Parmi les services aux entreprises, les activités de conseil de gestion, juridiques et comptables, et de programmation, conseil, affichent de fortes croissances. La location, notamment automobiles et matériel, est en repli ce mois-ci, sous l’effet des problèmes d’approvisionnement.
L’activité est quasi stable en août dans le secteur du bâtiment, alors que les chefs d’entreprises anticipaient le mois dernier une contraction. La situation de trésorerie se dégrade à nouveau légèrement dans l’industrie, comme dans les services marchands. Dans les deux cas, le niveau de l’indicateur se situe en-deçà de sa moyenne de long terme.
2. En septembre, selon les anticipations des entreprises, l’activité progresserait dans l’ensemble des trois grands secteurs
Pour le mois de septembre, les chefs d’entreprise interrogés anticipent une légère progression de leur activité dans l’industrie. Cette hausse concernerait la plupart des secteurs, à l’exception de l’automobile, l’habillement, textile, chaussures, l’industrie chimique, et les produits en caoutchouc, plastique.
Dans les services, les chefs d’entreprise s’attendent à une progression de l’activité dans la plupart des secteurs. Enfin, dans le secteur du bâtiment, l’activité s’améliorerait, surtout dans le second oeuvre.
Notre indicateur mensuel d’incertitude, construit à partir d’une analyse textuelle des commentaires des entreprises interrogées, indique un rebond des incertitudes en août dans l’industrie, les services marchands et le bâtiment. Dans l’industrie, l’indicateur retrouve quasiment le niveau atteint lors du déclenchement du conflit en Ukraine ; les chefs d’entreprise mentionnent principalement trois facteurs : l’énergie (hausse du prix de l’électricité, et éventuelles coupures ou rationnements), le pouvoir d’achat des ménages (et ses conséquences sur leur comportement de consommation) et les difficultés d’approvisionnement.
L’opinion sur la situation des carnets de commandes évolue peu en août dans l’industrie, et se dégrade nettement dans le bâtiment. Les niveaux actuels demeurent néanmoins, dans les deux cas, supérieurs à leur moyenne de long terme.
3. Poursuite de la baisse des difficultés d’approvisionnement et léger ralentissement de la hausse des prix ; les difficultés de recrutement restent élevées
Les difficultés d’approvisionnement demeurent élevées en août mais se réduisent pour le quatrième mois consécutif. La part des chefs d’entreprise qui jugent que les difficultés d’approvisionnement ont pesé sur leur activité diminue dans l’industrie (51 %, après 57 % en juillet) et dans le bâtiment (43 %, après 48 %).
Ce repli des tensions sur les approvisionnements bénéficie à la plupart des secteurs, notamment l’aéronautique, l’industrie chimique, et les produits informatiques et électroniques. Les difficultés restent néanmoins très élevées pour l’automobile.
Selon les chefs d’entreprise interrogés, le tassement des difficultés d’approvisionnement s’accompagne d’un nouveau ralentissement de la progression des prix de produits finis, à un niveau cependant encore élevé.
L’opinion des chefs d’entreprise sur l’évolution de leurs prix de produits finis au cours du mois écoulé reste orientée dans le sens d’une hausse des prix, mais avec une ampleur qui se réduit pour le quatrième mois consécutif. Leur opinion quant à l’évolution des prix de matières premières est quasi inchangée par rapport à juillet, à un niveau encore élevé.
21 % des chefs d’entreprise dans l’industrie manufacturière déclarent avoir augmenté leur prix de vente en août. Cette proportion est particulièrement élevée dans l’agro-alimentaire, l’industrie chimique, et l’industrie pharmaceutique. Elle s’élève à 30 % pour les entreprises du bâtiment, et à 15 % pour les services marchands. Les perspectives pour septembre suggèrent un rebond de la proportion de hausses de prix dans l’industrie (26 %) et les services (17 %), et surtout dans le bâtiment (43 %). Ce regain de hausse en septembre peut traduire en partie un effet saisonnier, les hausses de prix étant généralement moins nombreuses en août.
Les chefs d’entreprise ont également été interrogés sur leurs difficultés de recrutement. Elles se réduisent légèrement ce mois-ci, pour atteindre 57 % dans l’ensemble des secteurs. Les difficultés augmentent de nouveau légèrement dans l’industrie, à 50 %, alors qu’elles se replient dans le bâtiment (57 %, après 61 %).
4. Les estimations issues principalement de l’enquête, complétées par d’autres indicateurs, suggèrent pour août un niveau de PIB en hausse par rapport à juillet, et qui croîtrait encore en septembre
Pour le mois d’août, l’utilisation des informations de cette enquête à un niveau de désagrégation fin, ainsi que d’autres données dont nous disposons, nous amènent à estimer que le PIB serait en hausse assez sensible par rapport à juillet. Cela s’expliquerait par une dynamique favorable à la fois dans l’industrie et plus encore dans les services. Le secteur de la construction, en revanche, connaîtrait de nouveau une baisse en août, après juin et juillet.
Cette évaluation utilise aussi les données à haute fréquence que nous suivons à titre de complément pour les secteurs non couverts – ou partiellement – par l’enquête (notamment construction, commerce et transports), ainsi que pour confirmer notre évaluation sur l’industrie et les services couverts. En particulier, les données de trafic routier combinées aux données de cartes bancaires nous renseignent sur le secteur des transports, qui resterait dynamique en août. Les dépenses par carte bancaire donnent quant à elles des indications pour le secteur du commerce de détail, également en hausse en août par rapport à juillet.
Les anticipations des entreprises pour septembre dans l’enquête indiquent une légère hausse de l’activité par rapport à août, avec toujours des contrastes suivant les secteurs. Dans un contexte toujours fortement incertain, marqué par les effets de la guerre en Ukraine, la hausse du PIB pour le troisième trimestre 2022 pourrait s’établir autour de + 0,3 % par rapport au trimestre précédent.