La courbe de Phillips, un outil pour les Banques centrales
La courbe de Phillips établit une relation entre l’inflation et l’état de la conjoncture. Cette relation a été introduite il y a 60 ans, mais suscite toujours des débats récurrents, notamment sur sa possible disparition (Rue de la Banque n°56 ; pour une revue de littérature, voir Le Bihan, 2009).
Les prévisions d’inflation, dont celles réalisées dans le cadre de l’Eurosystème, reposent sur des modèles plus complexes que la courbe de Phillips. Cette dernière reste toutefois un outil largement utilisé, car elle permet de s’assurer de la cohérence d’un scénario macroéconomique à partir d’une modélisation réduite reposant sur quelques variables clés. Il existe cependant des incertitudes autour de la « meilleure spécification » de Phillips à utiliser (BCE, (2019), notamment sur le choix des variables explicatives, Béreau, Faubert et Schmidt (2018). Ces incertitudes justifient de retenir un éventail de spécifications plutôt qu’une seule. Ce type d’approche dit de « modélisation à plusieurs modèles prédictifs » ou thick modelling est celui retenu ici.
Le cône de Phillips permet de visualiser la relation prix - conjoncture
Ainsi, le « cône de Phillips » se définit comme un éventail de valeurs possibles obtenu à partir de différentes spécifications de la courbe et d’une prévision centrale, qui correspond à la médiane des différents modèles. Pour chaque date, le cône de Phillips est déterminé par l’écart entre la simulation la plus haute et la plus basse parmi les prévisions issues des spécifications retenues.
Le cône de Phillips présenté ici s’articule autour de trois spécifications standardisées. Elles comprennent, d’une part, une variable mesurant l’état de la conjoncture (l’écart de production, le taux de chômage ou l’écart entre le taux de chômage et le taux de chômage structurel) retardée d’un trimestre. D’autre part, on ajoute une variable de prix extérieurs afin d’intégrer les conditions relatives à la demande mondiale ou à des chocs extérieurs (prix relatifs des importations, prix des compétiteurs à l’importation, qui correspondent au prix des exportations des partenaires commerciaux de la zone euro, ou le prix du pétrole, ainsi que l’évolution des prix des autres matières premières). Enfin, l’estimation est augmentée d’un terme retardé de l’inflation IPCH (indice des prix à la consommation harmonisé) afin de refléter l’inertie du processus de formation des prix et les anticipations d’inflation des agents. Dans certaines équations, nous ajoutons également une variable correspondant aux variations du taux de TVA afin de prendre en compte les évolutions de la fiscalité (cf. schéma 1).