Discours

« À propos de notre politique monétaire : une bonne position, mais pas une position confortable, ni une position figée »

Intervenant

François Villeroy de Galhau – Interventions

François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France

Mise en ligne le 5 Décembre 2025

François Villeroy de Galhau – Interventions

Symposium 2025 du CEPR, Paris
Discours de François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France

Mesdames, Messieurs,

J’ai le plaisir de vous accueillir aujourd’hui à la Banque de France pour la quatrième édition du symposium annuel du CEPR, une excellente occasion pour les chercheurs et les décideurs de partager leurs connaissances. Nous venons d’entendre Philippe Aghion, lauréat du prix Nobel en 2025, qui nous a fait sortir de notre zone de confort en proposant des idées audacieuses sur l’innovation et la croissance. Et maintenant, permettez-moi de poser les fondations nécessaires que sont la confiance et la stabilité des prix : comment la politique monétaire traverse-t-elle les incertitudes actuelles ?

Trois ans après avoir atteint son pic, l’inflation se situe actuellement à 2,2 % dans la zone euro, restant à un niveau très proche de sa cible depuis mai 2025i . Grâce à la crédibilité et à l’action efficace de la Banque centrale européenne, cette désinflation a été obtenue sans déclencher de récession, ce que beaucoup d’observateurs avaient considéré comme improbable. Nous sommes, comme l’a fait observer Christine Lagarde, présidente de la BCE, « dans une bonne position ». Mais une bonne position n’est ni une position confortable, ni une position figée, comme je vais l’expliquer aujourd’hui. 

I. Une position qui n’est pas confortable : faire face à l’incertitude

Affirmer que nous nous trouvons en position confortable dans un monde aussi inconfortable serait à l’évidence excessif. L’incertitude s’est atténuée, mais elle reste élevée : les valorisations de l’IA, l’instabilité budgétaire et politique, les revirements commerciaux, les tensions géopolitiques et les doutes sur le rôle international du dollar américain empêchent les dirigeants d’entreprise et les décideurs de dormir. La plupart de ces incertitudes sont « knightiennes », c’est-à-dire qu’il n’existe pas d’ensemble bien défini de probabilités pour les différents résultats. L’inflation et les conditions économiques devenant moins prévisibles, les évaluations de l’état de l’économie et des risques divergent. Et lorsque les investisseurs ont des points de vue divergents, les marchés sont moins susceptibles de se stabiliser. Considérons les récentes évolutions sur les marchés obligataires d’une part, et sur les marchés des actions d’autre part. Les perceptions de marché relatives aux risques budgétaires augmentant, on observe des tensions sur la partie très longue de la courbe des taux. 

Dans le même temps, le marché des actions a surperformé, avec un ratio cours/bénéfices élevé et des spreads de crédit comprimés. Dans l’ensemble, cela suggère un certain optimisme à court et moyen termes mais des inquiétudes à plus long terme. 

Une tendance bien connue face à l’incertitude est l’action prudente, en invoquant le principe de Brainard en politique monétaireii. Pourtant, des études de la Banque de France montrent que cela peut s’avérer contre-productif si les agents anticipent une sous-réaction systématique aux chocs d’inflation. Pour citer Bernanke : « Le principe d’atténuation de Brainard peut ne pas être toujours valable […]. Une action plus forte de la banque centrale peut être justifiée pour éviter des résultats particulièrement coûteux. »iii  

Une approche de gestion des risques face à l’incertitude : un pragmatisme agile, tourné vers l’avenir avec l’analyse de scénarios.

D’où notre engagement répété envers une approche « s’appuyant sur les données, réunion par réunion » : plus qu’un mantra, il s’agit de mon concept favori de « pragmatisme agile ». S’appuyer sur les données signifie être pragmatique : notre réaction dépend de l’état de l’économie, qui recouvre non seulement les conditions économiques actuelles, mais aussi les perspectives et la balance des risques. 
Et l’approche réunion par réunion veut dire agilité. Mais cette approche ne veut pas dire que l’avenir n’est pas pris en compte. Les délais de transmission rendent l’analyse prospective essentielle, ce qui explique pourquoi nos projections jouent un rôle crucial dans le processus décisionnel. Mais nous devons également nous demander à quel point nos décisions sont robustes face à des chocs futurs plausibles et importants pour la politique monétaire qui pourraient survenir pendant ces délais. C’est là que l’analyse de scénarios prend toute sa valeur. 

Les chercheurs de la Banque de Franceiv préparent actuellement un exemple de cadre de gestion des risques en matière de politique monétaire qui s’appuie sur plusieurs scénarios. Permettez-moi de l’illustrer : en juin dernier, les services de la BCE ont produit deux scénarios de risque en plus du scénario de référence, comme le montre le graphique 1.a.

image Image Chart 1: Alternative Scenarios and Probabilities Thématique Governor Monetary policy Catégorie Speech
Optimal monetary policy across scenarios

Chaque scénario comporte une trajectoire optimale différente pour la politique monétaire, comme le montre le graphique 1.b. Notre cadre permet ensuite d’allouer des poids non seulement aux scénarios alternatifs, mais aussi au scénario de référence, comme le montre le graphique 2.a. 

image Image Chart 2: Alternative Scenarios and Optimal Policy Thématique Governor Monetary policy Catégorie Speech
Optimal monetary policy across scenarios

Ces pondérations sont déterminées sur la base de leur pertinence selon l’enquête de la BCE auprès des prévisionnistes professionnels (EPP). Nous pouvons ainsi concevoir un scénario « synthétique » correspondant à la moyenne pondérée du scénario de référence et des deux scénarios alternatifs de risque. Le graphique 2.b présente la synthèse qui en résulte. Malgré des trajectoires optimales différentes selon les scénarios, la trajectoire synthétique s’aligne très étroitement avec celle du scénario de référence. Cela s’explique par la faible probabilité assignée au scénario le plus extrême. En résumé, alors même qu’un choc extrême sur les droits de douane justifierait une politique monétaire plus accommodante, sa faible probabilité signifie qu’il n’est guère besoin de mesures de protection supplémentaires pour le moment.

Cela étant, de nombreuses questions restent ouvertes concernant les scénarios. Qui les sélectionne et qui les prépare ? Et au-delà, comment devons-nous les utiliser ? Deux options principales existent pour parvenir à une décision unique à partir d’un ensemble de scénarios : la première consiste à synthétiser les résultats des scénarios à l’aide de techniques comme la synthèse bayésienne – comme illustré ci-dessus – et la moyenne des résultats obtenus à partir de différents modèles (model averaging) ; la seconde consiste à choisir la trajectoire monétaire qui évite le pire résultat parmi les scénarios en suivant une approche de contrôle robuste. Chacune présente des avantages et des inconvénients. Globalement, je dirais que la synthèse de scénarios devrait être l’option préférée, tandis qu’un contrôle robuste reste utile face à des risques extrêmes, dont la plausibilité est difficile à évaluer. Dans ce cas, le décideur en matière de politique monétaire pourrait être plus soucieux de s’assurer contre le « mauvais état » du monde. 

De tels exercices de simulation permettent également de montrer comment la banque centrale est susceptible de réagir à des chocs, permettant aux agents de mieux connaître la règle de politique monétaire à partir de décisions plausibles et pas uniquement observées. Bien entendu, ces descriptions doivent rester indicatives et n’engager en rien.

Dans son rapport de politique monétaire de novembre 2025, la Banque d’Angleterre a intégré de manière intéressante les scénarios aux discussions et aux communications de son conseil de politique monétaire. Les minutes, rapports et communiqués de presse utilisent les scénarios pour souligner les risques entourant les principaux jugements de politique monétaire et pour expliquer les trajectoires alternatives, en faisant l’hypothèse que chaque scénario se concrétise. Les membres du conseil utilisent les scénarios pour expliquer leur décision au sein du conseil monétairev. Comme vous le savez, dans l’Eurosystème, nous préférons communiquer les décisions sans attribution individuelle des points de vue afin d’encourager des discussions entièrement ouvertes et de préserver la collégialité. Mais nous pourrions utiliser davantage les scénarios.

La communication en situation d’incertitude

La littérature montre que l’incertitude relative à la politique monétaire accroît la sensibilité des taux d’intérêt de marché aux surprises macroéconomiques  . Nous ne pouvons pas, bien sûr, réduire l’incertitude économique et géopolitique fondamentale. Mais les banques centrales peuvent réduire l’incertitude monétaire concernant leurs décisions futures au moyen d’une communication efficace, en améliorant la perception qu’ont les agents économiques du cadre de politique monétaire. 

Dans un contexte d’incertitude élevée, nous devons combiner un engagement ferme à maintenir l’inflation au niveau de sa cible symétrique de 2 % avec une orientation souple sur la trajectoire de taux d’intérêt. L’orientation souple n’est pas une forward guidance presque inconditionnelle et sur un « horizon long » telle que celle que nous avons utilisée au taux plancher effectif. L’orientation souple ne devrait pas non plus être considérée comme statique. Après nos réunions de juin et juillet, les marchés ont perçu à tort que la BCE avait nécessairement atteint son taux terminal. Cela a contribué à un resserrement pas vraiment souhaité de l’indice des conditions financières (ICF) (graphique 3.a) et, depuis juin dernier, la sensibilité des anticipations de taux aux anticipations d’inflation a diminué (graphique 3.b).

image Image Chart 3: Expectations and perception of the reaction function Thématique Governor Monetary policy Catégorie Speech
Expectations and perception of the reaction function

La signalisation souple fait partie de notre quotidien, dans lequel nous influençons les anticipations de marché concernant la politique monétaire à court terme tout en conservant l’optionalité. 

En outre, je suis convaincu que nous devons aborder ouvertement toutes les autres sources d’incertitude économique par une communication plus large et plus audacieuse, au-delà de la politique monétairevii. Aujourd’hui, l’incertitude provient principalement de la détérioration des finances publiques et des occasions manquées en matière de réformes structurelles. Si nous n’œuvrons pas en faveur d’une mise en œuvre complète des rapports Draghi et Letta d’ici le 1er janvier 2028, y compris « un 28e régime pour 2028 », qui le fera ? Le récent discours de Christine Lagarde à Francfort constitue une avancée remarquable dans cette direction : « six autres années d’inaction, et de croissance perdue, ne seraient pas seulement décevantes, elles seraient surtout irresponsablesviii».

II. Ni une position figée : affronter les défis qui nous attendent

À l’heure actuelle, notre bonne position n’est pas non plus figée. Permettez-moi d’abord de dissiper trois idées fausses qu’il m’arrive parfois d’entendre concernant notre fonction de réaction.

1. Trois idées fausses concernant notre fonction de réaction

La BCE serait revenue à un objectif « inférieur à, mais proche de 2 % ».

La première idée fausse concerne une asymétrie présumée de notre fonction de réaction. Certains pensent que nous pourrions tolérer une inflation inférieure à mais proche de 2 % pendant une période prolongée. Dans notre revue de stratégie depuis 2021, réaffirmée en 2025, nous avons clairement indiqué que notre cible d’inflation est totalement symétrique. Les écarts positifs et négatifs par rapport aux 2 %, s’ils persistent, sont également indésirables. Soyons clairs : nous ne « gardons pas nos cartouches en réserve » (we are not keeping our powder dry) pour créer un coussin avec le plancher effectif. 

Le seuil pour modifier les taux aurait augmenté. 

Deuxièmement, certains pourraient penser que nous devrions réagir uniquement si les écarts par rapport à la cible sont importants et les ignorer s’ils sont de faible ampleur. Mais comme je l’ai déjà soulignéix, ce qui importe n’est pas l’ampleur de l’écart, mais son caractère temporaire ou persistant. Des écarts même faibles mais durables peuvent affecter l’ancrage des anticipations d’inflation. C’est pourquoi nous devons analyser en profondeur l’effet de chaque choc afin de décider s’il convient de regarder à travers ou d’agir de façon préventive. L’agilité n’est pas de l’activisme excessif, mais pas non plus de la rigidité.

La BCE ne saurait se découpler de la Fed

Enfin, compte tenu de l’assouplissement récent de la Fed et dans une logique inverse erronée, certains recommandent que la BCE suive son exemple, mais à tort. Rappelons-nous qu’au printemps 2024, il y a eu un débat symétrique pour savoir si la BCE pouvait réellement réduire ses taux directeurs avant la Fed. Et c’est ce qu’a fait la BCE (graphique 4.a).

image Image Chart 4: Different path for the US and the EA Thématique Governor Monetary policy Catégorie Speech
Ecb independence and deculping

Malgré ce découplage, le marché des changes a absorbé cette situation sans turbulence, comme cela s’était déjà produit à plusieurs autres occasions au cours de la dernière décennie. 

En outre, permettez-moi de rappeler une évidence : nous sommes déjà nettement plus accommodants que les États-Unis. Notre taux de la facilité de dépôt est à 2 % et proche des estimations du taux naturel, et la taille de notre bilan est à 38 % du PIB [T3 2025], alors qu’elle représente 22 % du PIB aux États-Unis [T2 2025] (graphique 4.b). Le taux OIS à 10 ans s’établit à 2,5 % environ dans la zone euro, contre 3,5 % aux États-Unis. 

2.    Quelques réflexions sur la normalisation quantitative

Il a également été suggéré à tort que, puisque la Fed a achevé la réduction de son portefeuille de titres agrégé, nous devrions en faire de même. Néanmoins, cela soulève une question plus sérieuse concernant la taille adéquate de notre bilan. Je partage l’avis de ma collègue Isabel Schnabel sur le fait que le terme « resserrement quantitatif » est inapproprié pour décrire le processus actuel : nous devrions plutôt parler de « normalisation quantitative » (Quantitative normalisation, QN)x. Mais jusqu’à quand et jusqu’à quel niveau ? Nous discuterons l’année prochaine de la mise en œuvre de notre cadre opérationnel introduit en septembre 2024, mais permettez-moi de partager deux considérations :

  • Nous devons maintenir une liquidité abondante dans le système bancaire européen. À l’heure actuelle, elle reste encore abondante, avec un excédent de liquidité d’environ 2 500 milliards d’euros. Il convient de la comparer au niveau de liquidité nécessaire pour ancrer les taux du marché monétaire aux taux directeurs planchers, à savoir le FREL (floor required excess liquidity), estimé en moyenne à 1 500 milliards d’euros environ, avec toutefois un large intervalle de confiance autour de cette moyenne (graphique 5.b).
image Image Chart 5: The normalisation of repo programs and liquidity Thématique Governor Monetary policy Catégorie Speech
Balance sheet normalisation

Mais si nous devions nous retrouver dans une situation de liquidité plus rare dans la zone euro, ou perçue comme telle par les banques, cela risquerait d’entraîner un resserrement excessif du crédit, ainsi qu’une inégalité de traitement par rapport aux banques internationales.

  • Comme nous le savons tous, la liquidité peut être fournie « à la demande », via des opérations de refinancement à court terme et/ou des opérations structurelles de l’Eurosystème, y compris des opérations de refinancement à plus long terme et un portefeuille structurel. Le refinancement à court terme retrouvera une partie de l’importance qu’il avait avant la crise financière mondiale, mais nous devons également constituer un portefeuille structurel pour au moins deux raisons : les opérations de refinancement pourraient encore être associées à un effet de stigma pour les banques ; la banque centrale doit rester présente sur le marché obligataire, même au-delà du plancher effectif des taux, pour plusieurs raisons (transmission de la politique monétaire, changement climatique, etc.).

3. Le maître-mot est totale optionnalité.

Selon l’estimation rapide publiée mardi, l’inflation annuelle dans la zone euro a atteint 2,2 % en novembre. Cette position reste favorable, pour le septième mois consécutif. Cette moyenne masque néanmoins deux paradoxes. 

Cette stabilité couvre une dispersion de l’inflation entre les pays

Il existe une hétérogénéité significative entre les pays, avec une inflation faible en France (0,8 %) ou en Italie (1,1 %) et une inflation toujours élevée en Allemagne (2,6 %) et en Espagne (3,1 %). Cette hétérogénéité résulte principalement des prix des services : les pays où l’inflation dans les services est faible sont ceux qui présentent les taux d’inflation totale les plus bas (graphique 6.a). 

image Image Chart 6: Inflation dispersion across countries Thématique Governor Monetary policy Catégorie Speech
Inflation dispersion in Europe

Les différences en termes d’inflation dans les services résultent elles-mêmes en grande partie de la dynamique des salaires (graphique 6.b). En Allemagne, où les négociations salariales sont peu fréquentes, les salaires tardent à rattraper l’inflation passée, contrairement à la France, où les négociations sont annuelles et le salaire minimum est indexé. Lorsque le rattrapage aura été achevé dans chaque pays, nous pourrons espérer assister à une évolution vers des taux d’inflation plus bas dans le secteur des services en zone euro. 

Ces données d’inflation apparemment stables sont entourées de risques significatifs concernant les perspectives d’inflation. 

C’est le paradoxe actuel : des données stables, mais des risques significatifs. Des risques à la hausse pèsent sur l’inflation, tels que la fragmentation de la chaîne de valeur mondiale et les dépenses publiques consacrées à la défense et aux infrastructures en Allemagne. Il existe également des risques à la baisse : une plus grande décélération de la croissance des salaires, un euro plus fort et des importations moins chères en provenance de Chine. Au cours des six derniers mois de cette année par rapport à la même période de l’année précédente (mai à octobre 2025 par rapport à 2024), les importations chinoises dans la zone euro ont augmenté de 11 % en volume, et leur prix a diminué de 9 %. Pour donner un ordre de grandeur, les deux derniers phénomènes pourraient réduire l’inflation d’environ 0,2 point de pourcentage en 2027 selon les estimations de la Banque de France. Le report à 2028 du SEQE 2, voté par le Parlement européen, repoussera également son effet inflationniste d’environ 0,25 point de pourcentage de 2027 à 2028.

À ces risques baissiers « traditionnels », il convient d’ajouter un risque systémique « knightien » lié à l’instabilité financière résultant des valorisations des marchés boursiers mondiaux, du crédit privé et du niveau élevé de dettes publiques. En outre, cette instabilité financière pourrait être déclenchée par les attaques portées à la crédibilité et à l’indépendance de la Fed.

En résumé : a) les risques à la baisse sur les perspectives d’inflation restent au moins aussi importants que les risques à la hausse, et nous ne tolérerions pas un dépassement durable de notre cible d’inflation ; b) le maître-mot de nos prochaines réunions reste la totale optionnalité. Le seul chiffre fixe est notre cible d’inflation de 2 % ; ce n’est pas un taux d’intérêt terminal, et nous n’excluons aucune mesure de politique monétaire.

 

Dans la bataille pour atteindre la cible d’inflation, nous avons enfin pris de l’avance, ce qui n’est pas rien. Mais cette avance ne nous autorise aucun relâchement.  Comme disait René Lacoste, champion de tennis français : « Si l’on est sur le point de gagner, il faut penser qu’il n’est pas d’adversaire qui joue mieux qu’un adversaire près d’être battu. » Comme dans un match de tennis, ce n’est pas le dernier coup qui compte, mais le suivant. Nous ne devons pas rester figés sur le court et devons anticiper l’évolution du jeu. En d’autres termes, l’agilité se situe à la croisée de deux autres vertus : une extrême clarté quant à notre détermination à atteindre la cible d’inflation de 2 % ; une humilité pragmatique et une optionalité quant à nos prochains coups pour y parvenir. 

i En octobre 2022, le taux d’inflation en glissement annuel mesuré par l’IPCH a atteint un pic de 10,6 % dans la zone euro. En mai 2025, l’inflation se situait à 1,9 %, et elle n’a pas évolué au-dessous de 1,9 % ni au-dessus de 2,2 % depuis.
ii Brainard (W.C.) (1967), « Uncertainty and the Effectiveness of Policy », The American Economic Review, vol. 57, no 2, Papers and Proceedings of the Seventy-Ninth Annual Meeting of the American Economic Association, mai, p. 411-425.
iii Bernanke (B.S.) (2007), « Monetary Policy under Uncertainty », discours à la 32e conférence annuelle sur la politique économique, Banque fédérale de réserve de Saint Louis, 19 octobre ; Bauer (M.) et al. (2025), « Accounting for Uncertainty and Risks in Monetary Policy », Finance and Economics Discussion Series 2025-073, Conseil des gouverneurs du Système fédéral de réserve.
iv Lhuissier (S.) (2026), à paraître.
v Pill (H.) (2025), « Evolving UK monetary policy in an evolving world », discours à la conférence annuelle de l’Institute of Chartered Accountants of England and Wales, Londres, 17 octobre.
vi Bauer (M.D.), Pflueger (C.E.), Sunderam (A.) (2024), « Perceptions about Monetary Policy », The Quarterly Journal of Economics, vol. 139, no 4, 4 novembre ; Swanson (E.T.), Williams (J.C.) (2014), « Measuring the Effect of the Zero Lower Bound on Medium and Longer-Term Interest Rates », The American Economic Review, vol. 104, no 10, p. 3154-85, octobre.
vii Villeroy de Galhau (F.) (2024), « Perspectives sur la politique monétaire (II) : trois repères pour un futur de « grande volatilité » », discours à la London School of Economics, Londres, 30 octobre.
viii Lagarde (C.) (2025), « Transformer notre résilience en une véritable force : libérer le potentiel du marché intérieur européen », discours au 35e Congrès bancaire européen à Francfort, Francfort-sur-le-Main, 21 novembre.
ix Villeroy de Galhau (F.) (2024), « La politique monétaire en perspective (II) :  Trois jalons pour un avenir de « Grande volatilité » », discours à la London School of Economics, Londres, 30 octobre
x Schnabel (I.) (2025), « Towards a new Eurosystem balance sheet », discours à la ECB Conference on Money Markets 2025, Francfort-sur-le-Main, 6 novembre.

Mise à jour le 5 Décembre 2025