La Banque de France publie un second rapport pour partager ses leçons tirées de ses expérimentations sur la monnaie numérique de banque centrale (MNBC)

La Banque de France partage les leçons tirées de ses expérimentations de MNBC de gros utilisant des technologies de registre distribué (DLT).

Après la publication d'un premier rapport en 2021[1], la Banque de France publie aujourd'hui une nouvelle série de conclusions et d’enseignements, couvrant les première et deuxième tranches de son programme d'expérimentations sur la monnaie numérique de banque centrale (MNBC) de gros – aussi appelée MNBC interbancaire – lancé en mars 2020 et comprenant 12 expérimentations à ce jour. Ces conclusions contribuent aux travaux exploratoires de l'Eurosystème annoncés en avril 2023[2], qui visent à étudier comment les transactions financières de gros enregistrées sur des plateformes DLT pourraient être réglées en monnaie de banque centrale.

Grâce à ces expérimentations, la Banque de France démontre la faisabilité opérationnelle et la mise en œuvre pratique des trois modèles qu'elle a conceptualisés pour l'émission de MNBC directement sur DLT : (1) le modèle d'interopérabilité, (2) le modèle de distribution et (3) le modèle d'intégration. Tous trois abordent des aspects clés de la mise en œuvre d’une MNBC de gros et chacun offre des capacités et des fonctionnalités différentes par rapport aux systèmes conventionnels, de sorte qu'ils peuvent être considérés comme complémentaires plutôt qu'exclusifs.

Ces trois modèles ont été testés avec différents types de DLT et pour un large éventail de cas d’usage, couvrant deux domaines stratégiques majeurs : (i) la tokenisation de la finance et (ii) l'amélioration des transactions transfrontières.

Ces expérimentations ont permis de dégager huit enseignements clés :

         Principaux enseignements stratégiques

  1. L'émission d'une MNBC de gros, en complément d’une MNBC de détail, contribuerait à l'unicité de la monnaie en garantissant la valeur d'ancrage de la monnaie de banque centrale pour les paiements de détail et de gros, ainsi que la convertibilité entre les différentes formes de monnaie privée.
  2. La coopération internationale et les partenariats public-privé demeurent une priorité pour converger vers un cadre de développement des MNBC de gros plus inclusif permettant leur interopérabilité à l’échelle mondiale.
  3. L'interopérabilité devrait être une priorité pour assurer un échange de données et des transactions efficaces entre les infrastructures conventionnelles et celles fondées sur la DLT.
  4. Les préoccupations liées au climat soulignent la nécessité d'élaborer des solutions à haut rendement énergétique dans la conception des MNBC de gros.

    Principaux enseignements techniques
     
  5. Les avancées technologiques liées à la DLT offrent aux banques centrales divers moyens de garder le contrôle sur leur MNBC de gros.
  6. Les banques centrales devraient rester technologiquement neutres tout en contribuant activement à l'adoption de normes communes à l’échelle internationale.
  7. La DLT pourrait améliorer le traitement automatisé des activités de marché et post-marché et contribuer à la stabilité financière globale.
  8. La poursuite des expérimentations aux niveaux national et international est essentielle pour faire progresser notre analyse et nos efforts en vue d'élaborer un cadre opérationnel pour la MNBC de gros selon une approche d'apprentissage par la pratique.

Promouvoir le rôle de la monnaie de banque centrale, l'actif de règlement le plus sûr

Au travers de ses expérimentations, la Banque de France montre qu'une forme tokenisée de monnaie de banque centrale pourrait améliorer les paiements transfrontières ainsi que la finalité et la sécurité du règlement pour un large spectre d'actifs financiers – des obligations d'État aux parts de fonds – et pour un plus grand nombre de parties prenantes dans les transactions de gros. Une MNBC de gros serait par conséquent essentielle pour les actifs numériques natifs et les actifs tokenisés qui entrent dans la catégorie des actifs financiers non cotés et qui ne peuvent actuellement pas être réglés au moyen des services TARGET existants.

En ce qui concerne les transactions financières de gros, il est essentiel de donner la priorité à la monnaie de banque centrale et de renforcer son usage au sein de l'écosystème DLT, afin de poursuivre l’application des principes pour les infrastructures des marchés financiers (PFMIs)[3]. Cela est nécessaire pour maintenir la fonction d'ancrage de la monnaie de banque centrale pour les paiements interbancaires et de gros et pour assurer la stabilité des marchés financiers. L'émission d'une MNBC de gros, en complément d'une MNBC de détail, contribuerait également à l'unicité de la monnaie en garantissant la valeur d'ancrage de la monnaie de banque centrale pour les paiements de détail et de gros, ainsi que la convertibilité entre les différentes formes de monnaie privée.

Des travaux pionniers : tester les outils de la finance décentralisée (DeFi) et tester DL3S, sa propre DLT

La Banque de France a testé sa propre DLT, DL3S (Distributed Ledger for Securities Settlement System), afin d'évaluer sa flexibilité et son adaptabilité à différents cas d’usage ; d’autres DLT ont également été testées afin de gagner en expertise sur différentes technologies. La Banque de France a également testé l'utilisation d'un teneur de marché automatisé (AMM) dans le cadre de la dernière de ses expérimentations, le projet Mariana[4], conduit avec l'Autorité Monétaire de Singapour, la Banque Nationale Suisse et les pôles d’innovation de la BRI, ouvrant de nouvelles voies à l’optimisation de la liquidité des MNBC de gros par le biais d'un pool géré sur une plateforme DLT partagée.

Les prochaines étapes : soutenir les travaux exploratoires de l'Eurosystème et explorer les limites des paiements transfrontières

"Ces douze expérimentations, qui ont toutes été menées avec succès avec nos partenaires, banques centrales et banques commerciales, dans le cadre d'un partenariat public-privé, nous ont donné l'assurance que la monnaie de banque centrale peut être fournie sous forme de jetons – dits tokens – pour régler les actifs tokenisés et améliorer les paiements transfrontières. Nous sommes heureux de fournir notre solution DLT, DL3S, dans le cadre des travaux exploratoires annoncés par l'Eurosystème pour le règlement des transactions tokenisées, en utilisant la monnaie de banque centrale, y compris dans le cadre du régime pilote européen, et nous sommes également prêts à explorer d'autres solutions pour faciliter l'interaction entre les services TARGET et les plateformes DLT. Nous avons notamment démontré que notre solution DLT est capable d’interopérer avec les services TARGET ainsi que d’autres plateformes DLT. Nous avons à cœur de suivre les évolutions dans le domaine des paiements transfrontières et d'explorer de nouveaux concepts", a déclaré Emmanuelle Assouan, Directrice générale de la Stabilité financière et des Opérations.

De nouveaux horizons pour les paiements transfrontières

S’agissant des paiements transfrontières, l'approche de la Banque de France complète les récents travaux conceptuels menés par le FMI et la BRI. Le FMI étudie notamment la manière dont la DLT pourrait être utilisée pour servir des objectifs de politique publique, en mettant l'accent sur la conception de plateformes DLT multidevises pour faciliter les paiements transfrontières et les opérations de change, appelées XC platforms[5],[6]. De même, la BRI travaille à la conception d'une plateforme unique à travers le concept de unified ledger[7], qui vise à rassembler sur une seule DLT tous les types d'actifs tokenisés, y compris les dépôts tokenisés et les MNBC. Il s'agit de deux concepts prometteurs qui appellent des travaux complémentaires, auxquels la Banque de France souhaite contribuer, notamment par le biais de nouvelles expérimentations.

"Ce n'est que le début du voyage ; nous envisageons que de multiples DLT faisant circuler des MNBC de gros puissent coexister à l'échelle mondiale. Il est donc essentiel de travailler sur leur interopérabilité au stade premier de leur conception, afin d'éviter de reproduire les obstacles rencontrés lors de l'interconnexion des systèmes RTGS existants", a déclaré Emmanuelle Assouan.

À propos de la Banque de France


Institution indépendante, la Banque de France a trois grandes missions : la stratégie monétaire, la stabilité financière, les services à l’économie. Elle contribue à définir la politique monétaire de la zone euro et la met en œuvre en France ; elle contrôle banques et assurances et veille à la maîtrise des risques ; elle propose de nombreux services aux entreprises et aux particuliers.
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