Ce document de travail vise à analyser les différents motifs de demande de billets émis par la Banque de France. Depuis l'introduction de l'euro, les émissions nettes n'ont cessé d'augmenter au fil du temps, passant de 30 milliards d'euros en 2002 à près de 185 milliards d'euros à fin 2021. Ceci est vrai non seulement en termes absolus, mais aussi par rapport au PIB. Par conséquent, la demande domestique pour motif transactionnel ne peut pas, à elle seule, expliquer la demande de billets. La demande d’espèces peut être décomposée en différentes parts : transaction, thésaurisation et demande étrangère. Bien que la banque centrale connaisse exactement le montant d'espèces émises, il y a un manque d'informations sur qui les détient, pour quels motifs et où elles circulent. De plus, au sein de la zone euro, l'exercice est encore plus compliqué car les billets en euros émis en France peuvent migrer vers d'autres pays de la zone euro (et vice versa) sans aucun obstacle. Dans notre analyse, nous nous concentrons sur la situation de 2002 à fin 2019 pour ne pas introduire de biais lié à la pandémie de Coronavirus qui a eu d'énormes répercussions sur la demande d'espèces dans le monde entier.
Dans un premier temps, nous estimons les équations de demande de billets pour différents groupes de dénominations à l’aide de la cointégration. Ceci permet d’obtenir des informations sur la prévalence des différents motifs de détention de billets. Les résultats confirment que les motifs non transactionnels et transactionnels de détention d'espèces sont présents dans le cas de la France.
Pour estimer les parts correspondantes, des méthodes indirectes sont appliquées aux différentes caractéristiques propres aux espèces permettant de distinguer le montant de billets utilisé à des fins transactionnelles du montant de billets détenu à d’autres fins (dans le pays et à l'étranger). Nous nous concentrons principalement sur la méthode dite saisonnière, qui est appliquée aux émissions nettes de billets en France. L'objectif des méthodes saisonnières utilisées est de filtrer les informations sur les billets en circulation, qui ne sont pas utilisés à des fins transactionnelles en France, à partir des caractéristiques de la "structure saisonnière des billets".
En 2019, seuls environ 15 % des émissions nettes (représentant un total de 145 milliards d’euros) sont utilisées pour les transactions domestiques (voir graphique). Plus de la moitié des émissions nettes sont détenues hors de France, soit dans d'autres pays de la zone euro (ce qui signifie que la France est un exportateur net de billets au sein de la zone euro), soit, et surtout, hors de la zone euro. Enfin, nous estimons qu'environ 25 % des émissions nettes sont utilisées à des fins de thésaurisation domestique.