Afrique-France

Coopérations monétaires Afrique-France : rapport 2023

Mise en ligne le 29 Octobre 2024

Le rapport annuel 2023 des coopérations monétaires Afrique-France analyse les dernières évolutions économiques et financières en Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), en Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) et en Union des Comores. Établi sur la base des données statistiques les plus récentes des banques centrales de ces trois zones monétaires, il se compose de quatre chapitres dédiés au panorama de la situation en Afrique et dans chacune des trois régions précitées. L’année 2023 a notamment été marquée par la stabilisation de la croissance et le repli de l’inflation au niveau mondial, dans un contexte de crises géopolitiques, de tarissement des financements externes et de persistance de troubles sécuritaires régionaux.

Le rapport annuel 2023 comprend également trois articles visant à mettre en lumière différents enjeux et défis du continent africain. Les deux premiers ont été produits par des économistes de la Banque de France. Ils portent respectivement sur les liens entre inclusion et santé financières et sur les enjeux économiques de la perte de biodiversité en Afrique. Le troisième article, rédigé par un économiste de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC), traite de l’effet d’éviction des émissions de dette souveraine sur le crédit au secteur privé dans les unions monétaires d’Afrique centrale et de l’Ouest. Désormais ces articles, de même que ceux qui ont été publiés dans les précédents rapports annuels, seront directement accessibles en ligne (Cf. « Publications / Enjeux et défis africains ».).

Le rapport est enfin enrichi par les points de vue de la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) et de la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (Ferdi). L’étude réalisée par la BCEAO se concentre sur les sources de la croissance dans l’UEMOA. La Ferdi présente, quant à elle, ses travaux consacrés aux effets sur les pays de la CEMAC, de l’UEMOA et des Comores de la mise en place d’une taxation internationale du carbone du transport maritime.

Nous tenons à remercier chaleureusement la BCEAO, la BEAC et la Banque centrale des Comores (BCC) pour leur précieuse collaboration dans l’élaboration de ce rapport. En complément, des monographies de pays ainsi que les données du rapport annuel seront progressivement mises à jour sur le site de la Banque de France.

 

Olivier Garnier
Directeur général des Statistiques,
des Études et de l’International
Banque de France

Malgré une succession de chocs externes depuis 2020 – perturbations des chaînes d’approvisionnement à la suite de la crise de la Covid‑19, crises énergétique et alimentaire en lien avec la guerre russo-ukrainienne –, qui ont entraîné une poussée inflationniste et un resserrement de la politique monétaire, la croissance économique mondiale est restée relativement stable, légèrement au-dessus de 3 %. Après un pic à 8,7 % en 2022, l’inflation dans le monde s’est élevée à 6,8 % en 2023 et devrait s’établir à 5,9 % en 2024. Cette diminution profite essentiellement aux pays développés, qui devraient voir leur inflation s’élever à 2,6 % en 2024, alors que les pays émergents et en développement afficheraient une hausse des prix nettement plus soutenue (8,3 %, soit le même rythme qu’en 2023). Dans ce contexte, les conditions financières sont restées restrictives en 2023 sur les marchés internationaux, en particulier pour les pays les plus fragiles, qui ont fait face à des possibilités de financement sur les marchés internationaux encore fortement contraintes.

Le trafic maritime a par ailleurs été perturbé par les tensions survenues en mer Rouge en fin d’année 2023, ce qui a contraint de nombreux navires à se dérouter vers le cap de Bonne‑Espérance, mais également par de nouveaux épisodes de sécheresse dans le canal du Panama. Ces événements ont entraîné une hausse du coût du fret, en particulier en fin d’année 2023, qui a notamment touché les économies africaines, généralement très ouvertes et dépendantes du trafic maritime. Cela n’a toutefois pas empêché le commerce mondial de retrouver une dynamique positive en 2024 (+ 3,0 % en volume selon les prévisions du Fonds monétaire international, FMI), après un net ralentissement en 2023 (+ 0,3 %). Le montant des flux d’investissements directs étrangers (IDE) entrants a continué de reculer au niveau mondial (– 1,8 % en 2023, après – 16,4 % en 2022) et de façon plus marquée sur le continent africain (– 3,4 %, après – 33,7 %)(Cnuced (2024), Rapport sur l’investissement dans le monde, juin). Enfin, l’aide publique au développement en provenance des pays membres du Comité d’aide au développement (CAD) et à destination du continent africain a progressé de 3,1 % en 2023, après un net recul en 2022 (– 9,1 %) d’après l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

De nombreux pays africains ont par ailleurs continué de faire face à des chocs majeurs qui ont affecté leur économie. Plusieurs événements climatiques extrêmes ont touché le continent en 2023, en particulier dans le nord-ouest de l’Afrique, où de nombreux pays ont enregistré de nouveaux records de chaleur durant l’année.
En septembre et octobre, environ 300 000 personnes ont été touchées par des inondations qui ont frappé une dizaine de pays, dont le Niger, le Ghana, le Bénin et le Nigéria. Selon l’Organisation météorologique mondiale, les pays africains perdraient chaque année entre 2 et 5 % de leur PIB pour lutter contre les phénomènes climatiques extrêmes, alors que le coût de l’adaptation est estimé entre 30 et 50 milliards de dollars US par an au cours de la prochaine décennie en Afrique subsaharienne, soit 2 à 3 % du PIB de la région.

Enfin, les situations de conflit se sont de nouveau amplifiées sur le continent en 2023, notamment dans les pays des coopérations monétaires Afrique-France (CMAF).Selon l’Armed Conflict Location & Event Data (ACLED), les pays de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) ont recensé 9 719 événements conflictuels ayant fait au total 15 515 victimes en 2023, soit une hausse de respectivement 5,2 % et 12,4 % par rapport à 2022. Ces événements ont eu un impact important sur le nombre de réfugiés accueillis par les pays de ces deux zones : il a atteint 2,1 millions de personnes à la fin de l’année 2023, soit une hausse de 40,4 % sur un an (Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), Refugee Data Finder).

Malgré ce contexte difficile, les pays africains des CMAF ont été économiquement résilients. Ils ont en effet affiché une croissance économique de 4,3 % en 2023 (après 4,6 % en 2022), nettement supérieure à celle qui a été enregistrée au niveau mondial (3,3 % selon le FMI (FMI (2024), Perspectives de l’économie mondiale – Mise à jour, juillet) ou par l’ensemble des pays de l’Afrique subsaharienne (3,4 %). Par ailleurs, leur régime de change fixe a continué de les protéger du risque inflationniste dans un contexte d’inflation mondiale soutenue, en particulier dans les pays en développement. Les pays des CMAF ont ainsi enregistré une inflation moyenne de 4,4 % en 2023, contre 6,7 % un an plus tôt, alors que les pays de l’Afrique subsaharienne ont affiché un pic inflationniste à 16,2 % en moyenne sur l’année (14,5 % en 2022). Face aux difficultés d’accès au financement sur les marchés mondiaux, les pays des CMAF ont continué de s’appuyer principalement sur les marchés régionaux de la dette, en UEMOA comme en CEMAC. Si cela a permis de répondre aux besoins croissants de financement des États, la pression s’est renforcée sur les marchés régionaux des titres publics. Le desserrement progressif des contraintes de financement externe en 2024 a permis de réduire quelque peu ces tensions, puisque certains pays ont pu lever des fonds sur les marchés internationaux après deux ans d’absence. La plupart des pays des deux zones ont, de plus, continué de bénéficier de financements en provenance d’institutions internationales, en particulier du FMI et de la Banque mondiale. La facilité pour la résilience et la durabilité (FRD), mise en place par le FMI en 2022 pour répondre notamment aux défis liés au changement climatique et à l’apparition de nouvelles crises sanitaires, a notamment été accordée à cinq pays des CMAF.

La croissance du PIB réel pour les pays des CMAF s’est élevée à 4,3 % en 2023, après 4,6 % en 2022.
Cette légère diminution masque une disparité importante

 

Croissance de la population totale(en %)
Sources : Banque mondiale (World Development Indicators, WDI) et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF.
  2020 2021 2022 2023
Monde 1,0 0,9 0,8 0,9
Afrique subsaharienne 2,7 2,6 2,5 2,5
Coopérations monétaires Afrique-France (CMAF) 2,9 2,8 2,8 2,8
- CEMAC 2,8 2,7 2,7 2,7
- UEMOA 2,9 2,9 2,9 2,9
- Union des Comores 1,9 1,9 1,8 1,8

 

Taux de croissance du PIB (en %)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour les agrégations CMAF et des pays exportateurs et importateurs de pétrole, fondées sur les PIB respectifs des pays.
  2020 2021 2022 2023
Monde -2,7 6,5 3,5 3,3
Afrique subsaharienne -1,6 4,7 4,0 3,4
- Pays exportateurs de pétrole -2,3 3,1 3,2 2,5
- Pays importateurs de pétrole -1,1 5,7 4,4 3,8
Coopérations monétaires Afrique-France (CMAF) 0,2 4,5 4,6 4,3
- CEMAC -1,7 1,7 2,9 2,3
- UEMOA 1,3 6,0 5,5 5,3
- Union des Comores 0,2 2,2 2,6 3,3

et croissante entre les zones CEMAC et UEMOA. Alors que le PIB a progressé de 5,3 % en UEMOA, il n’a augmenté
que de 2,3 % en CEMAC. Cet écart de croissance s’est accru par rapport à 2022 (3 points de pourcentage [pp],
contre 2,6 pp). Les pays exportateurs de pétrole (cinq sur six en CEMAC) ont en effet pâti du net recul des prix du pétrole exporté (– 20,9 % en 2023). Dans l’Union des Comores, l’activité économique a continué de se
redresser avec une croissance du PIB qui a atteint 3,3 % en 2023, contre 2,6 % un an plus tôt. Cette croissance
est cependant restée inférieure à celle de la population dans trois pays de la CEMAC et un pays de l’UEMOA.
Le PIB par habitant a ainsi reculé de 0,3 % en 2023 en CEMAC, contre une croissance de 2,3 % pour l’UEMOA.

Le déficit courant de l’espace des coopérations monétaires Afrique-France est resté sensiblement inchangé en 2023, à 3,4 %. À l’inverse de 2022, le déficit s’est réduit en UEMOA, à 7,5 % (9,9 % en 2022), tandis que l’excédent courant s’est nettement contracté en CEMAC, à 4,2 % (contre 8,1 % en 2022). En UEMOA, cette évolution résulte principalement de la réduction du déficit de la balance des biens, tandis que les pays de la CEMAC ont vu leurs exportations de biens se contracter (– 16,6 %), après une année 2022 exceptionnelle en raison de la forte hausse des prix des hydrocarbures. La baisse des prix de l’énergie en 2023 a ainsi essentiellement pesé sur les pays de la CEMAC, qui sont tous, à l’exception de la Centrafrique, exportateurs nets de pétrole et de gaz. La dispersion des niveaux de solde courant entre pays s’est réduite en 2023, mais reste importante avec un minimum de – 15,6 % au Sénégal et un maximum de 17,5 % au Tchad. Enfin, le solde de la balance courante de l’Union des Comores s’est de nouveau dégradé pour

Croissance du PIB constant par habitant (en %)
Sources : Banque mondiale (World Development Indicators, WDI) et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays.
  2020 2021 2022 2023
Monde -3,9 5,3 2,3 1,8
Afrique subsaharienne -4,5 1,6 1,1 0,4
Coopérations monétaires Afrique-France (CMAF) -2,4 1,8 1,9 1,5
- CEMAC -4,2 -0,7 0,5 -0,3
- UEMOA -1,4 3,2 2,7 2,3
- Union des Comores -2,1 0,2 0,5 0,9

s’élever à – 1,7 % du PIB en 2023, après – 0,4 % un an plus tôt. Cette évolution s’explique essentiellement par
la chute des exportations (– 43 %), après une année 2022 particulièrement bien orientée, et la hausse des
importations (+ 7,0 %).

La majorité des pays des CMAF ont bénéficié du reflux des tensions inflationnistes mondiales en 2023. Ce
constat est plus particulièrement vrai pour les pays de l’UEMOA, où l’inflation s’est établie à 3,7 %, contre 7,4 %
en 2022. Cette baisse est principalement imputable à la détente des prix des produits alimentaires liée au repli
des cours mondiaux, et à une production céréalière en 2022–2023 mieux orientée. Dans la CEMAC, les prix à
la consommation ont progressé de 5,6 % en moyenne en 2023, alimentés par une inflation des produits alimentaires persistante et un rebond des prix de l’énergie en raison de la réduction des subventions aux carburants. Au total, sur les 15 pays des CMAF, neuf ont affiché une inflation supérieure au plafond communautaire fixé à 3 % en moyenne annuelle ; chaque pays doit respecter ce critère de convergence suivi par les commissions régionales (L’objectif d’inflation annuelle des banques centrales est toutefois légèrement différent entre l’UEMOA et la CEMAC. La BCEAO a en effet fixé une zone cible qui est comprise entre 1 et 3 %, tandis que le Comité de politique monétaire de la BEAC a fixé un plafond à 3 %.) Comme pour les autres pays en développement, la baisse de l’inflation demeure plus lente que dans les économies avancées.

Dans ce contexte, l’orientation de la politique monétaire des banques centrales de l’UEMOA et de la CEMAC est restée restrictive en 2023. La Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) a remonté son principal taux directeur de 75 points de base durant l’année pour le porter à 3,5 %, et la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) a remonté le sien de 50 points de base pour le porter à 5 % (en comparaison, la Banque centrale européenne a quant à elle remonté ses taux de 200 points de base sur l’année).

Solde des transactions courantes, dons inclus (en % du PIB)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays
  2020 2021 2022 2023
Afrique subsaharienne -2,7 -1,0 -2,0 -2,8
Coopérations monétaires Afrique-France -2,7 -3,3 -3,3 -3,4
- CEMAC 0,3 2,1 8,1 4,2
- UEMOA -4,3 -5,9 -9,9 -7,5
- Union des Comores -1,8 -0,3 -0,4 -1,7

 

Inflation (moyenne annuelle, en %)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays.
  2020 2021 2022 2023
Monde 3,2 4,7 8,7 6,7
Afrique subsaharienne 10,2 11,0 14,5 16,2
Coopérations monétaires Afrique-France 2,2 2,9 6,7 4,4
- CEMAC 2,3 1,6 5,5 5,6
- UEMOA 2,1 3,6 7,4 3,7
- Union des Comores 0,9 0,1 12,4 9,0

 

Enfin, en Union des Comores, l’inflation a quelque peu diminué mais est restée soutenue, passant de 12,4 % en 2022 à 9,0 % en 2023. Pour faire face à ces pressions persistantes, la Banque centrale des Comores (BCC) a augmenté son principal taux directeur de 50 points de base, et a rénové son cadre de politique monétaire afin de mieux piloter la liquidité du système bancaire.


Le déficit budgétaire moyen des pays des CMAF a baissé en 2023, mais cette évolution masque d’importantes disparités entre les pays, notamment entre ceux qui exportent et ceux qui importent des hydrocarbures. En UEMOA, où les pays sont encore principalement importateurs d’hydrocarbures, les déficits se sont réduits en 2023 dans un contexte de baisse des prix mondiaux de l’énergie, pour passer de 6,9 % du PIB en moyenne en 2022 à 5,2 % en 2023 (L’augmentation de la production d’hydrocarbures attendue au Sénégal, au Niger et en Côte d’Ivoire devrait soutenir la réduction des déficits de la zone dans les années à venir. Cf. chapitre 3 du présent rapport annuel). Ce repli s’explique par les efforts de consolidation budgétaire enregistrés dans l’ensemble des pays de la zone, à l’exception de la Guinée-Bissau. Le rythme de progression des recettes budgétaires a ainsi accéléré (+ 12,2 % en 2023, après + 10,9 %), tandis que celui des dépenses publiques a nettement baissé (+ 2,5 %, après + 15,8 %). Le taux de pression fiscale s’est pour sa part amélioré, mais reste inférieur à l’objectif communautaire de 20 % du PIB (14,3 %). En CEMAC, le repli des recettes pétrolières (– 20,0 %) est le principal élément qui explique le déficit budgétaire (– 0,2 % du PIB) enregistré en 2023, après une année 2022 marquée par un excédent net qui a atteint 2,8 % du PIB. Si la chute des recettes pétrolières a été partiellement amortie par la hausse des recettes non pétrolières, les dépenses totales ont continué de croître rapidement (+ 12,4 %), portées par les dépenses courantes (+ 12,9 %). Au total, la dispersion des niveaux de solde budgétaire entre pays s’est réduite entre 2022 et 2023, avec un écart-type passant de 6,7 points de pourcentage (pp) à 3,6 pp, pour un solde budgétaire qui s’étend de – 6,7 % au Burkina Faso à + 5,6 % au Congo. En Union des Comores, les recettes publiques ont sensiblement augmenté (+ 16,7 %) grâce à des efforts importants de collecte des taxes et à la suppression d’exonérations fiscales. Malgré la hausse des dépenses totales (+ 12,3 %), le déficit budgétaire s’est réduit, passant de – 1,7 % à – 1,1 % en 2023.

Après une année de léger recul, le ratio de dette publique sur PIB a progressé en 2023, pour atteindre 57,8 % dans les pays des CMAF. Cette hausse concerne aussi bien les pays de l’UEMOA (+ 1,4 pp) que les pays de la CEMAC (+ 1,6 pp) avec des dynamiques toutefois différentes. Comme pour les soldes budgétaires, l’évolution de

Solde budgétaire, dons inclus (en % du PIB)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays
  2020 2021 2022 2023
Afrique subsaharienne -6,5 -4,9 -4,4 -4,1
Coopérations monétaires Afrique-France -4,2 -3,6 -3,3 -3,5
- CEMAC -2,1 -1,4 2,8 -0,2
- UEMOA -5,4 -4,9 -6,9 -5,2
- Union des Comores 0,0 -2,3 -1,7 -1,1

 

Ratio dette publique / PIB (en%)
Sources : BCEAO, BEAC, BCC, FMI et calculs Banque de France pour l’agrégation CMAF, fondée sur les PIB respectifs des pays
  2020 2021 2022 2023
Afrique subsaharienne 57,0 56,2 57,2 60,1
Coopérations monétaires Afrique-France 53,1 56,6 56,3 57,8
- CEMAC 59,6 60,7 53,1 54,7
- UEMOA 49,6 54,5 58,3 59,7
- Union des Comores 27,0 31,0 30,0 28,0

 

l’endettement en CEMAC a été fortement contrainte par la baisse du prix des hydrocarbures en 2023, après une année 2022 où les pays de la zone avaient pu accroître leurs encours de remboursements nets et ainsi réduire leur ratio de dette publique (– 7,6 pp). En UEMOA, si l’endettement a continué de croître en 2023, la hausse du ratio de dette publique est nettement plus modérée que celle enregistrée les années précédentes. Le service de la dette pèse toutefois de plus en plus sur les finances publiques (le paiement des intérêts sur la dette représente 16,3 % des recettes fiscales en 2023, contre 11,2 % en 2019). En Union des Comores, le ratio s’est contracté pour la deuxième année consécutive, pour s’élever à 28,0 %.

Les secteurs bancaires de l’UEMOA et de la CEMAC ont continué d’afficher une dynamique positive. L’activité du secteur bancaire en UEMOA a toutefois été moins dynamique qu’en 2022, en lien avec le resserrement de la politique monétaire et un moindre appétit des banques pour les titres publics, en raison de contraintes de bilan. La progression du bilan bancaire s’est établie à 2,9 % en 2023, contre 16,6 % un an plus tôt, tandis que le produit net bancaire (PNB) a crû de 10,0 %, contre 16,8 % un an plus tôt. En CEMAC, le total de bilan du secteur a augmenté de 11,4 % (10,6 % en 2022), alors que le PNB a augmenté de 4,6 % (après + 14,4 %). Ces progressions masquent toutefois des vulnérabilités persistantes notamment en matière d’exposition des banques au risque souverain, dans un contexte de besoin croissant de financement des États, et de marchés internationaux restés fermés tout au long de l’année. Si l’exposition des banques de l’UEMOA s’est stabilisée en 2023 grâce aux rachats de titres publics opérés par la BCEAO sur le marché secondaire des titres, celle-ci a considérablement augmenté en CEMAC et est susceptible de rendre le secteur bancaire vulnérable à une éventuelle crise souveraine de liquidité d’un ou plusieurs États de la zone.

La situation prudentielle des banques des pays des CMAF s’est légèrement améliorée en 2023, bien que de nombreuses banques demeurent en difficulté. Si les taux bruts de créances en souffrance ont continué de s’améliorer, aussi bien en CEMAC qu’en UEMOA, le taux de provisionnement des créances en souffrance s’est dégradé en UEMOA, ce qui s’est traduit par une détérioration du taux net. En CEMAC, malgré la baisse enregistrée en 2023, l’encours de créances en souffrance est resté à un niveau préoccupant, notamment en Guinée équatoriale et au Tchad, où le taux brut est resté supérieur à 30 %.

Taux bruts de créances en souffrance (en %)
Sources : BCEAO, BEAC et BCC
  2021 2022 2023
CEMAC 19,5 18,5 16,0
UEMOA 10,6 8,8 8,5
Union des Comores 16,5 13,9 14,0

 

Taux nets de créances en souffrance (en %)
Sources : BCEAO, BEAC et BCC
  2021 2022 2023
CEMAC 8,1 7,9 4,7
UEMOA 4,1 3,3 3,7
Union des Comores 5,0 6,0 6,0

 

En 2023 et au premier semestre 2024, la plupart des pays de l’UEMOA et la moitié des pays de la CEMAC ont continué de bénéficier de l’appui financier du FMI. En effet, s’agissant de la CEMAC, les programmes du FMI en faveur du Tchad et du Gabon ont expiré à l’été 2024, et aucun programme n’a été conclu en Guinée équatoriale depuis fin décembre 2022. Les pays de l’UEMOA ont continué de bénéficier de facilités du FMI, à l’exception du Mali, tandis que les décaissements ont été temporairement interrompus au Niger, à la suite du coup d’État de juillet 2023. De son côté, l’Union des Comores bénéficie d’un programme du FMI au titre de la facilité élargie de crédit (FEC) depuis juin 2023. Après les programmes d’urgence, sans conditions afin de faire face immédiatement à la crise de la Covid‑19, il s’agit désormais de programmes classiques avec conditionnalités, et ce pour une durée de trois, voire quatre ans, comme au Burkina Faso et aux Comores.

L’activité économique devrait être dynamique en 2024 dans les pays des CMAF, alors que l’inflation serait moins marquée en comparaison des années précédentes. Les perspectives économiques pour 2024 sont ainsi positives dans l’ensemble des zones. Selon la BCEAO, la croissance du PIB de l’UEMOA devrait atteindre 7,0 %, essentiellement portée par le dynamisme des secteurs primaire (grâce à une campagne agricole plus favorable) et secondaire, avec la hausse attendue de la production d’hydrocarbures au Sénégal notamment. En CEMAC, la BEAC anticipe une croissance du PIB de 3,3 % en 2024, essentiellement tirée par les secteurs non pétroliers, dont l’activité augmenterait de 3,8 %, contre une hausse de seulement 1,0 % pour les activités pétrolières. La BCC prévoit enfin une croissance de 3,8 % dans l’Union des Comores, qui serait portée par l’ensemble des secteurs. Ces niveaux de croissance peuvent être comparés à ceux qui sont estimés par le FMI au niveau mondial et pour l’Afrique subsaharienne à respectivement 3,2 % et 3,7 %, mais également à la croissance démographique des pays des CMAF en 2023, comprise entre 2,0 % et 3,8 % (2,8 % en moyenne). L’inflation devrait sensiblement reculer, en particulier en CEMAC, où elle s’établirait à 3,9 %, alors qu’elle s’élèverait à 2,9 % en moyenne en UEMOA et à 2,5 % aux Comores. La baisse des prix des produits alimentaires, liée au recul des cours mondiaux des engrais et des denrées alimentaires, expliquerait notamment cette évolution. Cette inflation resterait ainsi nettement inférieure à celle qu’anticipe le FMI pour l’Afrique subsaharienne, à 15,3 % en 2024.

Si la BCEAO et la CEMAC prévoient par ailleurs une amélioration des soldes budgétaires et des transactions courantes des deux zones en 2024, la réalisation de ces prévisions est toutefois conditionnée à la poursuite des réformes structurelles engagées, notamment en matière de consolidation budgétaire. Ces prévisions demeurent en effet soumises à des risques de chocs adverses importants, principalement liés à des événements climatiques extrêmes ou à des tensions sécuritaires, qui pourraient réduire les marges de manoeuvre budgétaires déjà limitées, en particulier en UEMOA.

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Mise à jour le 16 Janvier 2025