Bulletin économique de la BCE

Bulletin économique de la BCE n°6/2025

Mise en ligne le 25 Septembre 2025

Le Bulletin économique résulte de l'obligation légale faite à la BCE de publier des rapports sur les activités du SEBC au moins chaque trimestre (en vertu de l’article 15.1 des Statuts du SEBC). Les éditions publiées après les réunions de politique monétaire de mars, juin, septembre et décembre fournissent une analyse approfondie des évolutions économiques et monétaires.

Évolutions économiques, financières et monétaires

Vue d’ensemble

Lors de sa réunion du 11 septembre 2025, le Conseil des gouverneurs a décidé de laisser inchangés les trois taux directeurs de la BCE. L’inflation se situe actuellement autour de la cible à moyen terme de 2 % et l’évaluation, par le Conseil des gouverneurs, des perspectives d’inflation est globalement inchangée.

Les projections macroéconomiques de septembre 2025 établies par les services de la BCE pour la zone euro présentent une image de l’inflation analogue à celle projetée en juin. Elles prévoient que l’inflation totale s’établira en moyenne à 2,1 % en 2025, 1,7 % en 2026 et 1,9 % en 2027. S’agissant de l’inflation hors énergie et produits alimentaires, elle ressortirait en moyenne à 2,4 % en 2025, 1,9 % en 2026 et 1,8 % en 2027. L’économie devrait croître de 1,2 % en 2025, soit une révision à la hausse par rapport au taux de 0,9 % projeté en juin. La projection de croissance pour 2026 est désormais légèrement plus faible, à 1,0 %, tandis que la projection pour 2027 est inchangée, à 1,3 %.

Le Conseil des gouverneurs est déterminé à assurer la stabilisation de l’inflation au niveau de sa cible de 2 % à moyen terme. Il suivra une approche s’appuyant sur les données pour déterminer, réunion par réunion, l’orientation appropriée de la politique monétaire. Plus particulièrement, les décisions du Conseil des gouverneurs relatives aux taux d’intérêt seront fondées sur son évaluation des perspectives d’inflation et des risques entourant ces perspectives, compte tenu des données économiques et financières disponibles, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire. Le Conseil des gouverneurs ne s’engage pas à l’avance sur une trajectoire de taux particulière.
 

Activité économique

L’économie a crû de 0,7 % en termes cumulés au cours du premier semestre 2025, tirée par la résilience de la demande intérieure. En rythme trimestriel, la croissance a été plus soutenue au premier trimestre et plus faible au deuxième trimestre, traduisant en partie une anticipation initiale du commerce international avant les hausses attendues des droits de douane, puis une inversion de cet effet.

Les indicateurs tirés d’enquêtes suggèrent une poursuite de la croissance dans le secteur manufacturier comme dans les services, signe d’une dynamique sous-jacente positive dans l’économie. Même si la demande de main-d’œuvre s’atténue, le marché du travail reste une source de vigueur, le taux de chômage s’étant établi à 6,2 % en juillet 2025. Avec le temps, cela devrait stimuler les dépenses de consommation, en particulier si, comme anticipé dans les projections de septembre 2025, les ménages épargnent une part moindre de leur revenu. Les dépenses de consommation et l’investissement devraient bénéficier de la transmission des réductions antérieures des taux directeurs du Conseil des gouverneurs aux conditions de financement. L’investissement devrait également être soutenu par d’importantes dépenses publiques dans les infrastructures et la défense.

Les droits de douane et l’incertitude qui en résulte ont contribué à de fortes fluctuations de l’activité économique au premier semestre 2025, avec une concentration de l’activité en début de période, en particulier en Irlande. La dissipation de ces facteurs au second semestre de l’année devrait accentuer la volatilité, brouillant les signaux de la dynamique sous-jacente de l’économie de la zone euro. En fait, si l’on fait abstraction de la volatilité due aux fluctuations des données irlandaises, la croissance économique dans le reste de la zone euro a été plus stable et devrait le rester au second semestre de l’année. Bien que le nouvel accord commercial entre les États-Unis et l’UE implique une hausse des droits de douane sur les exportations de la zone euro vers les États-Unis, il a contribué à réduire l’incertitude entourant la politique commerciale. L’incidence globale de l’évolution des politiques dans le monde ne deviendra claire qu’avec le temps. Plus tard sur l’horizon de projection, la croissance économique de la zone euro devrait se renforcer, soutenue par plusieurs facteurs. La hausse des salaires réels et de l’emploi, ainsi que de nouvelles dépenses publiques consacrées aux infrastructures et à la défense, principalement en Allemagne, devraient soutenir la demande intérieure de la zone euro. En outre, des conditions de financement moins restrictives – reflétant principalement les décisions récentes de politique monétaire – et un rebond de la demande extérieure en 2027 sont également considérés comme favorables aux perspectives de croissance.

La croissance annuelle moyenne du PIB en volume devrait s’établir à 1,2 % en 2025, 1,0 % en 2026 et 1,3 % en 2027. Par rapport aux projections de juin 2025, les perspectives de croissance du PIB ont été révisées à la hausse, de 0,3 point de pourcentage pour 2025, reflétant des données disponibles meilleures qu’anticipé et un acquis de croissance résultant des révisions sur les données historiques. Toutes les données non anticipées n’étant pas liées à une concentration plus forte que prévu précédemment de l’activité en début de période, elles ne devraient être que partiellement contrebalancées au second semestre de l’année. L’appréciation de l’euro et l’affaiblissement de la demande extérieure (en partie liés à des droits de douane légèrement plus élevés qu’anticipé dans les projections de juin) ont entraîné une révision à la baisse de 0,1 point de pourcentage pour 2026. La projection pour 2027 reste inchangée.

Le Conseil des gouverneurs considère qu’il est essentiel de renforcer, sans attendre, la zone euro et son économie dans l’environnement géopolitique actuel. Les politiques budgétaires et structurelles devraient améliorer la productivité, la compétitivité et la capacité de résistance de l’économie. Un an après la publication du rapport de Mario Draghi sur l’avenir de la compétitivité européenne, il demeure crucial de suivre ses recommandations avec de nouvelles actions concrètes et d’en accélérer la mise en œuvre, conformément à la feuille de route de la Commission européenne. Il appartient aux gouvernements de privilégier les réformes structurelles et les investissements stratégiques favorables à la croissance tout en assurant la pérennité des finances publiques. Il est essentiel d’achever l’union pour l’épargne et l’investissement ainsi que l’union bancaire, selon un calendrier ambitieux, et de rapidement mettre en place le cadre législatif nécessaire à l’introduction potentielle d’un euro numérique.

Inflation

L’inflation en rythme annuel reste proche de la cible du Conseil des gouverneurs, à 2,1 % en août 2025 contre 2,0 % en juillet. La baisse des prix de l’énergie s’est établie à – 1,9 %, après – 2,4 % en juillet, tandis que la hausse des prix des produits alimentaires a ralenti, à 3,2 %, après 3,3 %. L’inflation hors énergie et produits alimentaires est restée constante à 2,3 %. La progression des prix des services a légèrement diminué, à 3,1 %, contre 3,2 % en juillet, tandis que la hausse des prix des biens est demeurée inchangée, à 0,8 %.

Les indicateurs de l’inflation sous-jacente restent conformes à la cible du Conseil des gouverneurs de 2 % à moyen terme. La croissance annuelle de la rémunération par tête s’est établie à 3,9 % au deuxième trimestre, contre 4,0 % au trimestre précédent et 4,8 % au deuxième trimestre de 2024. Les indicateurs prospectifs, notamment l’outil de suivi des salaires de la BCE et les enquêtes sur les anticipations relatives aux salaires, suggèrent que la progression des salaires va continuer de se modérer. Cette évolution, conjuguée aux gains de productivité, contribuera à contenir les tensions d’origine interne sur les prix, même si les bénéfices se redressent à partir de niveaux faibles.

Les nouvelles projections établies par les services de la BCE présentent une image de l’inflation semblable à celle projetée en juin. L’inflation totale, mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), devrait rester stable, autour de 2 %, jusqu’à fin 2025, puis reculer à 1,7 % en moyenne en 2026 avant de se redresser pour s’établir à 1,9 % en 2027. La baisse prévue en 2026 reflète une nouvelle atténuation progressive des composantes hors énergie, tandis que la hausse des prix de l’énergie devrait rester volatile, mais s’accentuer sur l’horizon de projection, en partie en raison du système d’échange de quotas d’émission de l’UE 2, qui démarrera en 2027. La hausse des prix des produits alimentaires devrait rester élevée dans un premier temps, à mesure que les effets décalés des hausses passées des prix internationaux des matières premières alimentaires se répercutent, mais elle devrait ensuite se modérer pour s’établir légèrement au-dessus de 2 % en 2026 et 2027.

L’inflation mesurée par l’IPCH hors énergie et produits alimentaires devrait diminuer pour revenir de 2,4 % en 2025 à 1,9 % en 2026 et 1,8 % en 2027, avec l’atténuation des tensions sur les salaires et le ralentissement de la hausse des prix des services, tandis que l’appréciation de l’euro se répercute le long de la chaîne des prix et freine la hausse des prix des biens. La croissance plus faible des salaires, due à la récupération des pertes de salaire réel passées, conjuguée à un redressement de la croissance de la productivité, devrait entraîner un ralentissement sensible de la croissance des coûts unitaires de main-d’œuvre.

Par comparaison avec les projections de juin 2025, les perspectives relatives à la hausse de l’IPCH total ont été révisées à la hausse de 0,1 point de pourcentage pour 2025 et 2026. Cela s’explique par des hypothèses et des résultats plus élevés relatifs aux prix des matières premières énergétiques, ainsi que par les effets décalés de l’augmentation des cours internationaux des matières premières alimentaires, qui font plus que compenser les effets de l’appréciation de l’euro. Pour 2027, les effets décalés de l’appréciation de l’euro sont considérés comme prédominants, entraînant une révision à la baisse de 0,1 point de pourcentage.
La plupart des mesures des anticipations d’inflation à plus long terme continuent de s’établir autour de 2 %, favorisant la stabilisation de l’inflation au niveau de la cible du Conseil des gouverneurs.

Évaluation des risques

Les risques pesant sur la croissance économique sont devenus plus équilibrés. Si les accords commerciaux conclus récemment ont réduit l’incertitude, une nouvelle dégradation des relations commerciales pourrait limiter davantage les exportations et freiner l’investissement et la consommation. Une détérioration de la confiance sur les marchés financiers pourrait entraîner un durcissement des conditions de financement, une plus grande aversion au risque et un affaiblissement de la croissance. Les tensions géopolitiques, tenant notamment à la guerre injustifiée menée par la Russie contre l’Ukraine et au conflit tragique au Moyen-Orient, demeurent une source d’incertitude importante. En revanche, une augmentation plus importante que prévu des dépenses consacrées à la défense et aux infrastructures, associée à des réformes visant à accroître la productivité, favoriserait la croissance. Une amélioration de la confiance des entreprises stimulerait l’investissement privé. Une diminution des tensions géopolitiques, ou une résolution plus rapide que prévu des différends commerciaux encore présents, pourrait aussi stimuler la confiance et l’activité.

Les perspectives d’inflation restent plus incertaines que d’ordinaire, en raison de la volatilité persistante des politiques commerciales dans le monde. Avec l’appréciation de l’euro, le ralentissement de l’inflation pourrait être plus marqué qu’attendu. L’inflation pourrait aussi être plus faible si l’augmentation des droits de douane provoquait une baisse de la demande d’exportations adressée à la zone euro et une nouvelle hausse des exportations depuis des pays en surcapacité vers la zone euro. Les tensions commerciales pourraient se traduire par une volatilité et une aversion au risque plus importantes sur les marchés financiers, ce qui pèserait sur la demande intérieure et ferait ainsi également reculer l’inflation. En revanche, l’inflation pourrait être plus forte si une fragmentation des chaînes d’approvisionnement mondiales poussait les prix à l’importation à la hausse et renforçait les contraintes de capacité au sein de la zone euro. Un accroissement des dépenses consacrées à la défense et aux infrastructures pourrait également attiser l’inflation à moyen terme. Des phénomènes météorologiques extrêmes et, plus généralement, l’évolution de la crise climatique pourraient conduire à une hausse des prix des produits alimentaires plus importante qu’anticipé.

Conditions financières et monétaires

Depuis la réunion de politique monétaire de juillet 2025 du Conseil des gouverneurs, les taux de marché à court terme ont augmenté, tandis que les taux à plus long terme sont restés globalement inchangés. Toutefois, les réductions antérieures des taux d’intérêt directeurs du Conseil des gouverneurs ont continué de faire baisser les coûts des emprunts des entreprises en juillet. Le taux d’intérêt moyen appliqué aux nouveaux prêts aux entreprises est revenu à 3,5 % en juillet, après 3,6 % en juin. Le coût du financement par endettement de marché est resté inchangé à 3,5 %. Les prêts aux entreprises ont progressé de 2,8 %, soit un rythme légèrement plus soutenu qu’en juin, tandis que la croissance des émissions d’obligations d’entreprises s’est renforcée à 4,1 %, après 3,4 %. Le taux d’intérêt moyen sur les nouveaux prêts hypothécaires est de nouveau resté inchangé à 3,3 % en juillet, alors que l’activité de prêt hypothécaire s’est redressée à 2,4 %, après 2,2 %.

Décisions de politique monétaire

Les taux d’intérêt de la facilité de dépôt, des opérations principales de refinancement et de la facilité de prêt marginal ont été laissés inchangés, à respectivement 2,00 %, 2,15 % et 2,40 %.
Les portefeuilles du programme d’achats d’actifs (asset purchase programme, APP) et du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (pandemic emergency purchase programme, PEPP) se contractent à un rythme mesuré et prévisible, car l’Eurosystème ne réinvestit plus les remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance.

Conclusion

Lors de sa réunion du 11 septembre 2025, le Conseil des gouverneurs a décidé de laisser inchangés les trois taux directeurs de la BCE. Le Conseil des gouverneurs est déterminé à assurer la stabilisation de l’inflation au niveau de sa cible de 2 % à moyen terme. Il suivra une approche s’appuyant sur les données pour déterminer, réunion par réunion, l’orientation appropriée de la politique monétaire. Les décisions du Conseil des gouverneurs relatives aux taux d’intérêt seront fondées sur son évaluation des perspectives d’inflation et des risques entourant ces perspectives, compte tenu des données économiques et financières disponibles, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire. Le Conseil des gouverneurs ne s’engage pas à l’avance sur une trajectoire de taux particulière.

 

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Mise à jour le 25 Septembre 2025