Les coopérations monétaires Afrique-France tirent leur origine de la Zone franc, instituée par le décret du 9 septembre 1939. Alors que la Seconde guerre mondiale vient de débuter, il s’agit de préserver l’empire français de brutales fluctuations des changes. La France et ses territoires d’outre-mer forment une même zone monétaire, à l’intérieur de laquelle les flux de capitaux sont libres, avec une réglementation des changes commune et une gestion centralisée des réserves de change ; leurs monnaies sont librement convertibles entre elles, selon des parités qui demeurent fixes. En décembre 1945, en marge des négociations de Bretton Woods, une monnaie unique est créée dans les territoires africains sous souveraineté française : le franc des Colonies françaises d’Afrique (franc CFA), qui deviendra en 1958 le franc de la Communauté française d’Afrique.
Après leur indépendance, obtenue entre 1958 et 1960, la plupart des États d’Afrique subsaharienne issus de l’empire colonial français choisissent de conserver des liens étroits de coopération avec la France. Les instituts d’émission coloniaux sont transformés, donnant naissance à la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), avec le franc de la Communauté financière africaine (XOF) pour monnaie, et à la Banque centrale des États de l’Afrique équatoriale et du Cameroun (BCEAEC, future BEAC), qui émet le franc de la Coopération financière en Afrique centrale (XAF). Les accords conclus entre la France et les membres de chacune des unions monétaires fixent les principes de la coopération : maintien des parités fixes, liberté des transferts, centralisation des réserves de change et garantie illimitée de convertibilité au travers des comptes d’opérations. L’administration française et la Banque de France apportent en outre un appui matériel et technique substantiel au fonctionnement des instituts d’émission.
À partir de mars 1965, les ministres des Finances de la Zone franc se réunissent semestriellement, en amont des assemblées annuelles et des réunions de printemps du Fonds monétaire international (FMI).
De nouveaux accords de coopération monétaire sont signés, en novembre 1972 pour l’Afrique centrale et en décembre 1973 pour l’Afrique de l’Ouest. Ils marquent un tournant dans le partenariat entre la France et ses partenaires africains, qui évolue vers une plus grande responsabilité de ces derniers dans la gouvernance de leurs banques centrales. La réduction du poids des représentants français dans les conseils d’administration de la BEAC et de la BCEAO va ainsi de pair avec l’africanisation progressive des cadres et le transfert du siège des deux institutions de Paris vers l’Afrique, à Yaoundé (Cameroun) pour la BEAC en 1977 et à Dakar (Sénégal) pour la BCEAO en 1978. En contrepartie de sa garantie, la France continue toutefois de participer à la gestion et au contrôle des banques centrales.
L’adhésion aux accords de coopération constitue toujours un choix libre et souverain des États parties prenantes. Certains y mettent ainsi fin, à l’instar de la Mauritanie (1972) et de Madagascar (1973). À l’inverse, le Mali conclut une convention bilatérale avec la France en 1967, avant d’adhérer à l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA) en 1984. Indépendantes depuis 1975, les Comores signent également une convention de coopération monétaire avec la France en novembre 1979. L’Union monétaire de l’Afrique centrale (UMAC) s’élargit, en 1985, à la Guinée équatoriale et l’Union monétaire ouest-africaine (UMOA), en 1997, à la Guinée-Bissau.
Les années 1990 voient le renforcement de l’intégration régionale et la substitution de l’euro au franc. Afin de faire face à la détérioration de la compétitivité économique des partenaires africains, il est procédé le 11 janvier 1994 à une dévaluation de 50 % des francs CFA et de 33 % du franc comorien – la seule enregistrée depuis 1948. Cette dévaluation s’accompagne d’un approfondissement des unions monétaires, avec l’adoption des traités constitutifs de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (CEMAC), le 10 janvier et le 16 mars respectivement.
L’adoption de l’euro par la France n’affecte pas les accords de coopération monétaire, qui restent en vigueur. La France et ses partenaires africains demeurent les seuls responsables de leur mise en œuvre. Une décision du Conseil de l’Union européenne est néanmoins nécessaire dans deux cas de figure : soit lors d’un changement de portée des accords – tel que l’admission d’un nouvel État –, soit en cas de modification de leur nature même – que serait, par exemple, une remise en cause de la garantie française ou de la fixité des taux de change. Lors de son introduction, au 1er janvier 1999, la monnaie unique européenne remplace le franc français comme ancre monétaire des francs CFA et du franc comorien, sans modification de la parité.
L’accord signé en 2019 avec les États de l’UEMOA fait évoluer, pour ces pays, le cadre de la coopération monétaire. Selon les dispositions du nouvel accord, le rôle de la France devient celui d’un garant financier. Le compte d’opérations de la BCEAO auprès du Trésor français est clôturé et la République française ne désigne plus de représentant dans les instances de gouvernance de la Banque centrale, sauf quand sa garantie est susceptible d’être mise en jeu.
Mis à jour le : 30/10/2020 10:33