Note : Évolution depuis septembre 2012 de l’incertitude des marchés telle que mesurée par les taux de croissance quotidiens de l’indice VSTOXX (V2X) – l’indice le plus couramment utilisé dans la zone euro pour mesurer l’incertitude des marchés – les jours de réunion de politique monétaire du Conseil des gouverneurs de la BCE.
La communication du Conseil des gouverneurs de la BCE réduit vraiment l’incertitude des marchés
Avec l’introduction de politiques non conventionnelles, les banques centrales ont accru leurs efforts de communication. Néanmoins, les effets de cette communication renforcée sont loin d’être évidents. D’une part, une plus large information permet aux marchés de mieux évaluer l’impact des nouvelles politiques. D’autre part, la complexité même des politiques ou le fait de mettre l’accent sur la mauvaise conjoncture économique pour justifier leur introduction a pu accentuer, plutôt qu’atténuer, l’incertitude des marchés.
Dans ce billet, nous présentons une première évaluation des effets de la communication institutionnelle de la BCE sur l’incertitude des marchés mesurée par l’indice VSTOXX. Celui-ci est le plus couramment utilisé dans la zone euro pour mesurer cette incertitude. Le VSTOXX est conçu de manière à refléter les anticipations par les marchés de la volatilité sur un horizon de 30 jours. Nous étudions les variations de cet indice les jours des réunions de politique monétaire du Conseil des gouverneurs, quand le président de la BCE annonce publiquement les décisions de politique monétaire et répond aux questions lors d’une conférence de presse qui constitue, généralement, l’événement financier de la journée. Ainsi, le taux de croissance quotidien de l’indice VSTOXX à une date donnée du Conseil des gouverneurs fournit une approximation de la variation de l’incertitude des marchés liée à la communication institutionnelle de la BCE. Dans le graphique 1, chaque barre correspond au taux de croissance de l’indice VSTOXX observé les jours de réunion de politique monétaire du Conseil des gouverneurs de la BCE à compter de septembre 2012, juste après le pic de la crise de la dette souveraine en Europe.
Le premier constat est que, en moyenne, la communication officielle du Conseil des gouverneurs réduit l’incertitude des marchés. Plus précisément, sur 60 observations, 49 (soit 81,6 %) correspondent à une baisse de l’incertitude des marchés. En outre, l’amplitude moyenne de la variation au sein de l’échantillon est de -3,78 %, ce qui est nettement inférieur à la hausse moyenne de +0,2 % calculée sur la série quotidienne complète des taux de croissance sur la même période. Ce résultat contraste avec l’avis selon lequel la communication récente du Conseil des gouverneurs de la BCE aurait contribué à accentuer plutôt qu’à atténuer l’incertitude des marchés (Leombroni, Vedolin, Venter et Whelan (2018)).
L’incertitude des marchés est particulièrement sensible aux annonces concernant les achats d’actifs
Il est aussi intéressant de noter que l’incertitude des marchés est particulièrement sensible aux annonces concernant les achats d’actifs (cf. graphique 1). En effet, les trois plus fortes baisses de l’incertitude ont été observées le 6 septembre 2012, date de l’introduction des opérations monétaires sur titres (– 16,4 %) ; le 14 juin 2018, date de l’annonce de la fin probable des achats nets d’actifs (– 13,3 %) ; et le 22 janvier 2015, date d’une importante extension du programme d’achats d’actifs (– 11,8 %).
Toutefois, la sensibilité aux annonces concernant les achats d’actifs a également entraîné, le 2 octobre 2014, la plus forte hausse de l’incertitude des marchés (+ 10,8 %). Ce jour-là, le Conseil des gouverneurs de la BCE a annoncé le début des programmes d’achats d’obligations sécurisées et de titres adossés à des actifs en ne faisant que vaguement référence à l’impact du programme sur le bilan de la BCE.
Compte tenu de l’interprétation de cette intervention faite par les médias, on pourrait penser que l’absence de chiffres précis a accentué l’incertitude concernant son véritable impact. Cela tend à indiquer que la communication sur les achats d’actifs peut réduire efficacement l’incertitude des marchés lorsque les annonces sont perçues comme étant précises, alors qu’elle peut avoir l’effet opposé dans le cas contraire.
La communication du Conseil des gouverneurs de la BCE a récemment été associée à une moindre incertitude des marchés
L’analyse de l’impact, au fil du temps, de la communication du Conseil des gouverneurs de la BCE montre que la réduction de l’incertitude des marchés a été plus efficace récemment qu’avant et durant la crise. En effet, la comparaison des distributions des variations quotidiennes de l’incertitude des marchés sur les différentes périodes reflète cette tendance.
En particulier, la courbe bleue du graphique 2 retrace la distribution des variations quotidiennes de l’indice VSTOXX sur l’ensemble de la période (cf. graphique 1) en allant de la moins importante à la plus importante. On observe sur le même graphique des distributions analogues pour l’« échantillon de la crise », de janvier 2008 à août 2012, en vert et pour l’« échantillon d’avant la crise », de mars 1999 à décembre 2007, en rouge.
Nous faisons deux observations principales. Premièrement, l’« échantillon de la crise » et l’« échantillon d’avant la crise » ont des formes identiques pour les valeurs négatives. Cela suggère que la capacité de la communication de la BCE à réduire l’incertitude des marchés ne s’est pas détériorée durant la crise, malgré des augmentations plus fréquentes de l’incertitude (la ligne rouge est au-dessus de la verte dans la partie des variations positives de l’incertitude des marchés).
Deuxièmement, en comparant les trois courbes, on constate que la période la plus récente est très en deçà des deux autres. La communication du Conseil des gouverneurs de la BCE depuis 2012 a donc globalement fait preuve d’une efficacité sans précédent dans la réduction de l’incertitude des marchés. Cela dénote une amélioration remarquable de la communication de la BCE, notamment au regard de la complexité croissante des politiques non conventionnelles.