Le taux d’intérêt issu de notre modèle baisse de 157 points de base (pb) entre 1980 et 2015, et une diminution supplémentaire de 76 pb est prévue d'ici 2100. Si l’on compare aux mesures de l’évolution du taux d’intérêt naturel entre 1980 et 2015 obtenues à partir des données, la démographie est capable de répliquer 75 % de la baisse d’environ 210 pb estimée par Holston et al. (2017) et environ 45 % de la baisse ressortant de la mesure de Rachel et Smith (2017).
Le principal mécanisme déclenché par la transition démographique est le suivant. Premièrement, les ménages anticipent un allongement de leur durée de vie et prévoient qu’ils passeront plus de temps à la retraite. Ils sont donc prêts à transférer une plus grande partie du revenu obtenu pendant leur vie active vers le futur, afin de lisser leur consommation. Deuxièmement, le ralentissement de la croissance démographique et l’accroissement de la longévité impliquent que les ménages plus âgés constituent une plus grande part de la population totale en vie à chaque période. Ces deux évolutions entraînent une hausse du niveau de l'épargne agrégée rapportée au PIB. Pour que le marché des capitaux reste équilibré malgré cette augmentation de l’offre de capitaux, le taux d’intérêt diminue.
Sans surprise, l’évolution démographique n’explique pas à elle seule la totalité de la baisse du taux d’intérêt depuis 1980, ce qui laisse de la place à d’autres explications, peut-être plus transitoires, du niveau actuellement bas des taux d’intérêt. Toutefois, les évolutions démographiques elles-mêmes ne s’inversent pas et impactent l’économie avec un taux d’intérêt naturel durablement plus bas, comme le montre la tendance baissière des taux d’intérêt après 2030.
Notre cadre théorique permet ensuite d’élaborer un diagnostic plus large de l’impact du vieillissement sur le patrimoine immobilier, les prix du logement, le ratio de la dette des ménages rapportée au PIB et la position extérieure nette. Outre l'utilité qu'ils tirent du logement, les ménages peuvent l'utiliser comme un moyen supplémentaire pour transférer de la richesse dans le temps, dans la mesure où il s’agit d’un bien durable qui peut être vendu pour financer la consommation et la transmission d’héritage. Lorsque les taux d'intérêt diminuent, la demande de logements augmente, ce qui entraîne une hausse les prix des logements et accroît le ratio patrimoine immobilier/PIB.