Lorsqu’une entreprise rencontre des difficultés pour repayer ses dettes, qu’elle soit insolvable ou en amont de l’insolvabilité, elle peut entreprendre une procédure de restructuration de la dette. À l’issue de la procédure, l’entreprise dite « restructurée » doit respecter ses nouvelles échéances de remboursement pour maintenir son activité et éviter la liquidation. Parmi les facteurs décisifs de sa réussite figure son accès au crédit bancaire. Sachant que les plans de restructuration durent en moyenne dix ans, si l’entreprise ne peut plus emprunter ni investir, sa survie en sera fortement compromise.
C’est pourquoi ce papier analyse l’accès au crédit bancaire des entreprises restructurées. Je questionne l’existence de contraintes de crédit bancaire associées à l’information de la défaillance passée de l’entreprise.
Pour tester l'existence d'une telle restriction, je tire parti du fait que l’information sur la défaillance passée de l’entreprise est prise en compte dans sa cote de crédit attribuée par la Banque de France durant une période limitée. La cotation de la Banque de France a pour objectif d’informer les banques de la santé financière d’une entreprise et de sa capacité à honorer ses engagements. Lorsque l’entreprise émerge de défaillance avec un plan de restructuration, l’information sur la défaillance passée est utilisée pour le calcul de sa cote de crédit qui prend alors automatiquement une valeur « risquée ». Cependant, au bout de trois à cinq ans après la défaillance, la loi impose que l’information sur la défaillance passée n’impacte plus la cote de crédit, qui dès lors ne prend plus automatiquement une valeur « risquée ». Par une méthode en différence-de-différence, je montre que la suppression de l'information sur la défaillance passée (le « flag removal ») permet aux entreprises d’accroître leur accès au crédit bancaire. Les entreprises dont la cote de crédit évolue très favorablement obtiennent du crédit de la part de leurs banques historiques. Pour les entreprises dont la cote de crédit devient « neutre » et qui sont donc davantage contraintes que les entreprises dont la cote est bonne, j'observe également une augmentation de crédit bancaire, moins importante, et qui provient en partie de la formation de nouvelles relations bancaires.
Je discute le fait que les banques réagissent à ce changement de cotation malgré le fait que l’information sur la défaillance passée reste disponible par ailleurs gratuitement sur internet. Une partie de l'effet provient vraisemblablement de la cote de crédit de la Banque de France qui oriente le comportement des investisseurs.
In fine, cette augmentation de l'accès au crédit bancaire résulte en une baisse de l'utilisation du crédit inter-entreprises et une augmentation du taux d'investissement des entreprises en restructuration. Mes résultats vont dans le sens des politiques récentes qui visent à réduire le temps de mise à disposition de l'information sur les défaillances passées. Ce papier met l’accent sur l’importance de l’accompagnement des entreprises dans leur rebond.