Discours

Inflation, politique monétaire et stabilité financière : bilan et perspectives pour la France et la zone euro

Intervenant

Denis Beau Intervention

Denis Beau, Premier sous-gouverneur de la Banque de France

30 Mai 2023
Denis Beau Intervention

Conférence

CCI Le Havre

26 mai 2023

Discours de Denis Beau, Premier sous-gouverneur de la Banque de France.

 

 

Mesdames et Messieurs, je me réjouis d’être ici avec vous aujourd’hui pour vous parler de l’évolution de la situation macroéconomique et financière dans la zone euro et en France et de la conduite des politiques que nous menons à la Banque de France et dans l’Eurosystème pour assurer nos missions de stabilité monétaire et financière.

L’impact économique et financier de la guerre en Ukraine a en effet profondément modifié les perspectives de sortie de la crise Covid telles que l’on pouvait les appréhender il y a un an, et soumis notre système économique et financier à de nouveaux chocs importants d’offre et de demande, qui se sont traduits par une forte accélération de l’inflation.

Après avoir présenté la situation et les perspectives macroéconomiques telles que nous les analysons aujourd’hui à la Banque de France, je vous dirai quelles conséquences nous en tirons en terme de politique monétaire. Je vous présenterai enfin les conséquences du changement d’environnement économique et monétaire sur la stabilité financière.

 

1. Situation et perspectives macroéconomiques

S’agissant de la situation macroéconomique, l’économie de la zone euro a été affectée par une série de chocs sans précédent au cours des dernières années. » [slide 2].  La dégradation des perspectives économiques depuis le début de l’année 2022 trouve son origine notamment dans la guerre en Ukraine et le confinement en Chine qui ont alimenté un choc de « slow-flation ». Ce choc menaçait de se transformer en choc « stagflationniste ». Cette menace ne s'est pas matérialisée jusqu'à présent. Les données et les enquêtes les plus récentes indiquent plutôt un ralentissement significatif de la croissance économique dans la zone euro, suivi d'une reprise. Plusieurs facteurs ont contribué à ce ralentissement.

Comme éléments d’explication figure en particulier et en premier lieu le choc négatif sur les termes de l’échange résultant des prix très élevés de l’énergie, qui affecte le revenu réel des ménages et des entreprises. Pour la France, ce choc sur les termes de l’échange pourrait être le deuxième plus important depuis le premier choc pétrolier de 1974 (de l’ordre de 1,4% du PIB).

Le coût économique de ce choc devrait se réduire de 2/3 en 2023 et rester limité en 2024 et en 2025.

Des goulets d’étranglement au niveau de l’offre en terme d’approvisionnement et de recrutement ont également joué négativement sur l’activité. Même s’ils s’atténuent, en particulier les difficultés d’approvisionnement, ils continuent de contraindre l’activité économique. L’environnement géopolitique est le troisième grand facteur de ralentissement à l’œuvre, avec en particulier la guerre injustifiable menée par la Russie en Ukraine. Il pèse sur la confiance des chefs d’entreprise et des consommateurs.

[slide 3].

En conséquence, selon les projections macroéconomiques de la BCE du mois de mars, la croissance annuelle moyenne du PIB de la zone euro devrait ralentir à 1,0 % en 2023 (contre 3,6 % en 2022), avant de remonter à 1,6 % en 2024 et 2025. Concernant l’inflation, celle-ci ne devrait ralentir que progressivement et revenir vers 2% fin 2024 et en 2025. La prévision d’inflation de la BCE pour la zone euro est ainsi de 5,3% en 2023, 2,9 % en 2024 et 2,1 % en 2025.

[slide 4]

Pour l'économie française, les perspectives sont globalement similaires. L'activité économique devrait croître à un rythme limité en 2023, avant de se redresser en 2024 et 2025. Le PIB devrait croître de 0,6 % en 2023, puis de 1,2 % en 2024 et de 1,7 % en 2025. Nous devrions donc effectivement échapper à la récession en France comme dans l'ensemble de la zone euro.

Ces prévisions s'appuient sur des perspectives de consommation des ménages qui croîtraient légèrement en 2023 (+0,4 %) puis accéléreraient en 2024 (+1,5 %) et en 2025 (+1,6 %) avec le rebond du pouvoir d'achat. Ces prévisions sont fondées sur l’observation que les hausses de prix à la consommation se transmettent déjà en partie aux salaires nominaux, qui alimentent eux-mêmes en retour des hausses des prix selon une relation prix-salaires habituelle. En outre, l’impact du choc sur les termes de l’échange et en particulier celui de la facture énergétique, sur les revenus réels est largement amorti par les nombreuses mesures budgétaires de soutien au pouvoir d’achat mises en place1. Nous estimons à la Banque de France ce prélèvement lié à la facture énergétique autour de 60 milliards d’euros ou de 2,5 % du PIB pour l’année 2022.

S’agissant des entreprises, leurs plans d’investissements devraient être modérément affectés sur l’horizon de prévision.  L’augmentation des coûts de l’énergie, l’accélération des salaires nominaux et la faiblesse des gains de productivité, due notamment à la montée de l’alternance et des comportements de rétention de main d’œuvre pour préparer le rebond ultérieur de l’activité, devraient peser sur les marges et donc leur profitabilité. Toutefois, le taux de marge des sociétés non financières, exceptionnellement soutenu en 2020 et 2021 par les différentes mesures mises en place pour faire face à la crise Covid, se situerait sur la période 2023-2024, à un niveau proche de son niveau pré-crise (autour de 31,5%). Ensuite, le taux de marge remonterait légèrement pour s’établir à près de 32% en 2025.

Parallèlement, la tendance à la hausse du taux d’investissement s’interromprait sur l’horizon de prévision, conséquence du ralentissement de l’activité, de comportements attentistes liés à l’incertitude macroéconomique et de la normalisation des conditions financières. Sur l’ensemble de l’horizon de prévision, le taux d’investissement des sociétés non financières se stabiliserait ainsi à environ 25,5 % de leur valeur ajoutée.

Un dernier mot pour clore cette présentation de la situation et des perspectives en matière d’inflation. [slide 5]

Depuis sa résurgence en 2021, l'inflation a continué à augmenter en 2022 à un rythme jamais atteint depuis les années 1980. En 2023, dans un contexte de baisse des prix de l'énergie, l'inflation dans la zone euro a commencé à se tasser pour atteindre +7,0 % à la fin du mois de d’avril. En France, selon les résultats de l'indice des prix à la consommation harmonisé, l'inflation s'est établie à 6,9 %, grâce notamment au bouclier tarifaire, mais elle reste largement supérieure à la cible d'inflation de l'Eurosystème.

Nous estimons à la Banque de France, comme nos collègues des autres banques centrales de l’Eurosystème, que la forte accélération de l’inflation trouve fondamentalement son origine non pas dans un excès de liquidité, mais dans les goulets d’étranglement qui résultent du rebond plus rapide que prévu de l’activité à l’issue de la pandémie ainsi que dans la forte hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation, largement exacerbée par la guerre en Ukraine.

En 2022, l’envolée des prix de l’énergie sur les marchés internationaux a constitué le principal choc inflationniste pour l’économie française. Certes, ce choc s’est répercuté de manière contenue en 2022 sur les prix de détail de l’énergie, en raison notamment du bouclier tarifaire, mais il s’est transmis aussi indirectement et avec un délai de quelques mois aux autres composantes de l’inflation, via les répercussions de l’alourdissement des coûts des producteurs.

Ainsi, l’inflation en France et en zone euro s’est diffusée très largement et revêt désormais un caractère « interne » et « généralisé », avec une hausse de l’ensemble des autres composantes de l’inflation : d’après les résultats du mois d’avril, l’inflation sous-jacente (qui exclut l’énergie et l’alimentation) s’élève désormais à 5,6 % en zone euro et à 4,7 % en France, et la hausse des prix se propage aux biens et aux services – qui représentent l’autre moitié de l’inflation totale.

C’est cette inflation plus « interne » dont les banques centrales sont responsables, et qu’elles ne doivent pas laisser persister.

Selon nos prévisions de mars, l’inflation devrait atteindre son pic au cours du premier semestre, avant de se replier pour revenir vers 2 % fin 2024 et en 2025. Cette décrue de l’inflation à l’horizon de la prévision résulterait de l’effet combiné de plusieurs facteurs : la stabilisation en 2023 des prix des matières premières, emportant la dissipation des effets de base associés à leur hausse antérieure, les effets du changement d’orientation de la politique monétaire qu’a décidé le Conseil des Gouverneurs de la BCE pour ramener l’inflation à 2 %, sur laquelle je vais maintenant concentrer mon propos, et, corrélativement le maintien de l’ancrage des anticipations d’inflation à moyen terme au voisinage de la cible d’inflation de la BCE.

 

2. Conséquences pour la politique monétaire 

Quelles sont donc les implications du changement de situation et de perspectives macroéconomiques que je viens de décrire pour la politique monétaire en zone euro ? [slide 6]

Du point de vue de la politique monétaire, ce changement a eu pour effet de changer la nature du risque principal qu’elle doit réduire : le risque pour la stabilité des prix auquel nous sommes confrontés n’est plus celui d’une inflation « trop faible trop longtemps » mais celui d’une inflation « trop élevée trop longtemps ». Ce changement fondamental appelait un changement d’orientation de la politique monétaire. C’est pourquoi, dans un premier temps, le Conseil des Gouverneurs a décidé de démanteler les mesures adoptées pour lutter contre le risque de déflation.

Ainsi, pour ce qui concerne les taux d’intérêt directeurs de la BCE, le Conseil des gouverneurs de la BCE a décidé de les augmenter à rythme accéléré, de 250 points de base au total en 6 mois entre juillet et décembre 2022 pour les ramener au taux neutre, qui désigne le niveau d’équilibre théorique auquel il n’y a ni nouvelle accélération ni ralentissement monétaires de l’inflation.

A la Banque de France, nous estimons que le taux neutre se situe à un niveau proche de 2 % en termes nominaux dans la zone euro.

Il est clair qu'avec les augmentations de taux d'intérêt décidées en janvier, mars et mai, le Conseil des Gouverneurs de la BCE est allé plus loin et fait entrer la politique monétaire dans un territoire « restrictif » au sens technique du terme.

Les questions importantes concernent ainsi désormais l’ampleur et la durée de ce durcissement de la politique monétaire.

Dans la déclaration de politique monétaire du 4 mai dernier, Christine Lagarde a rappelé que les décisions futures de politique monétaire devront garantir que les taux directeurs seront ramenés à des niveaux suffisamment restrictifs pour permettre un retour rapide de l'inflation à notre objectif à moyen terme de 2 % et qu’ils seront maintenus à ces niveaux aussi longtemps que nécessaire. Dans ce contexte, le Conseil des Gouverneurs continuera à suivre une approche dépendant des données pour déterminer le niveau et la durée appropriés du maintien des taux dans ce territoire « restrictif » en se fondant sur trois évaluations :

  • celle des perspectives d'inflation à la lumière des données économiques et financières ;
  • celle de la dynamique de l'inflation sous-jacente ;
  • et celle de la transmission de la politique monétaire.

L'inflation globale a diminué au cours des derniers mois, mais les tensions sous-jacentes sur les prix restent fortes. Dans le même temps, les hausses de taux d’intérêt passées se transmettent progressivement mais pleinement aux conditions de financement et aux conditions monétaires au sein des pays de la zone euro2. Les délais et la force de la transmission à l'économie réelle restent toutefois incertains.

S’agissant du taux « terminal », je voudrais ici simplement souligner que les intervenants de marché ne prévoient pas aujourd’hui de fort resserrement supplémentaire des taux directeurs de la BCE, les anticipations se situant désormais un peu au-dessus de 3,5 % [slide 7].

Dans le contexte que je viens de décrire, un rôle important pour la politique monétaire sera de veiller à ce que les anticipations d’inflation restent ancrées, en particulier tant que l’inflation demeure élevée. Jusqu’à présent, c’est le cas et il n’y a pas de signe qu’une éventuelle boucle prix-salaires est à l’œuvre. Mais la vigilance doit rester de mise. [slide 8]

La prévision et l’engagement du Conseil des Gouverneurs est que l’inflation devrait ralentir pour revenir proche de 2 % en 2025, à mesure que ses moteurs actuels s’estomperont et que la normalisation de la politique monétaire produira ses effets sur l’économie et dans les mécanismes de fixation des prix.

 

3. Conséquences du changement d’environnement économique et monétaire sur la stabilité financière [slide 9]

J’en viens maintenant aux conséquences pour la stabilité financière, en commençant par le constat que le système financier européen s’est montré résilient face aux chocs récents : Covid-19, invasion de l’Ukraine, et plus récemment, difficultés rencontrées par certaines banques régionales américaines (Silicon Valley Bank, Signature Bank, First Republic), ainsi qu’une banque systémique suisse (Crédit Suisse).

Dans les facteurs qui contribuent à expliquer cette résilience, les difficultés rencontrées par les banques américaines ont mis en lumière le rôle du cadre prudentiel bâlois, renforcé après la Grande Crise Financière de 2007-2008.

Au sein de l’Union européenne, près de 4700 établissements bancaires sont assujettis au cadre bâlois (dont environ 1200 sous contrôle direct de la BCE), contre seulement treize aux États-Unis, consécutivement à la mise en place en 2019 de règles allégées (la « tailoring approach ») au bénéfice des banques dites régionales dont le total bilan était inférieur à 250 milliards de dollars. C’est ainsi que SVB, dont l’exposition et l’absence de gestion du risque de liquidité et de taux de son business model lui ont été fatales, n’appliquait pas les ratios bâlois de liquidité (LCR et NSFR), et le rapport post-mortem de la FED publié le 28 avril dernier constate que SVB ne respectait plus le ratio LCR depuis plusieurs mois.

La déconfiture de SVB plaide ainsi d’abord et avant tout pour une mise en œuvre pleine et entière des exigences de Bâle III, et renforce notre attachement à l’ACPR et à la Banque de France à la transposition des derniers apports de l’Accord Bâle III, d’ici je l’espère fin juin 2023. Au niveau international, nous militerons pour clarifier que tout régime prudentiel plus simple qui serait défini pour un sous-ensemble de banques, au nom de la proportionnalité, devrait systématiquement respecter une exigence de cohérence globale avec les standards bâlois.

La faillite de SVB a mis également en lumière l’importance d’une surveillance exigeante, intrusive et réactive de la part des autorités de supervision.

La FED, dans son rapport post mortem déjà cité, reconnaît sans complaisance ses propres défaillances dans le domaine de la supervision, à la fois s’agissant de l’identification des risques et des actions entreprises pour remédier à ces risques. Cette importance de la supervision est également une leçon que l’on peut tirer du rachat par UBS de Crédit Suisse, dont la chute ne peut être expliquée par la non-application des règles bâloises : si une bonne réglementation est nécessaire, elle n'est en effet jamais suffisante. Les risques générés par les faiblesses identifiées depuis plusieurs années en matière de gouvernance du Crédit Suisse auraient dû conduire à des exigences de supervision plus élevées.

J'entends parfois des doutes sur les modalités du contrôle des superviseurs, qui, pour certains, doit être considéré comme un dialogue juridique, prudent dans sa forme et lent dans ses effets. Non, la supervision peut et doit être intrusive – y compris sur site – rapide dans sa réaction, exercée par des praticiens hautement qualifiés. Ce n'est pas un vœu pieux : c'est notre expérience depuis des décennies avec l'ACPR, et maintenant depuis bientôt dix ans, avec le Mécanisme de supervision unique européen.

Ces constats sur la robustesse du cadre actuel de régulation bancaire et l’importance de son déploiement comme contribution à la résilience des banques ne signifient pas néanmoins qu’on ne puisse pas encore l’améliorer évidemment. [slide 10]

À cet égard, en matière de surveillance du risque de liquidité par exemple, les événements récents appellent à réfléchir sur les hypothèses réglementaires en matière de fuite des dépôts – à l’ère de la digitalisation, l’accès facilité à l'information ainsi qu'aux comptes bancaires a-t-il fondamentalement modifié le risque de liquidité des banques, de telle sorte que les ratios réglementaires devraient être radicalement durcis ? Cette réflexion devra néanmoins partir du principe que ces ratios bâlois standardisés, LCR et NSFR, ne sont pas supposés à eux seuls prévenir la survenance de paniques bancaires ; ils ne visent pas à protéger contre toutes les dimensions du risque de liquidité et de financement, y compris les situations où le stress de liquidité est plus grave et se matérialise plus rapidement que prévu.

Notre sentiment à l’ACPR est que les outils déjà prévus par Bâle dans le cadre du processus de supervision, le Pilier 2, permettent d’ores et déjà au superviseur d’avoir une vision fine des risques de chaque banque, en particulier pour ce qui concerne la liquidité ; Bâle prévoit ainsi un suivi du niveau de concentration des passifs, par produits et par contreparties – qui aurait été particulièrement utile dans le cas de SVB, dont un des problèmes venait du niveau excessif de concentration des passifs. Une piste de réflexion pourrait ainsi être le renforcement et la systématisation de l’utilisation de ces outils de Pilier 2.

Les cas de SVB et de Crédit Suisse nous poussent aussi à réfléchir à des améliorations du cadre de gestion de crise de façon à le rendre plus opérationnel et plus fiable face au risque de paniques bancaires plus rapides.

Tout d’abord, il faut pouvoir fournir un montant significatif de liquidités en période de crise, lorsqu’une banque entre en résolution. À cet effet, dans l’Union européenne, les sources de financement existantes doivent être complétées par un mécanisme d’apport de liquidités crédible, protecteur des deniers publics et prévisible pour l’ensemble des acteurs du marché. Ce mécanisme manque à l’heure actuelle.

Ensuite, les autorités doivent être davantage préparées à mobiliser l’ensemble des outils de résolution à leur disposition. Depuis 2016 et la mise en œuvre de la directive qui a créé le régime européen de résolution des crises bancaires (BRRD), l’accent a été mis sur la préparation à l’utilisation du renflouement interne, pierre angulaire de la résolution garantissant la juste mise à contribution des actionnaires et créanciers en cas de crise. Les épisodes de crises bancaires récents confirment que les outils de transfert d’activité méritent d’être mobilisés en complément du renflouement interne. Les crises de SVB et de Crédit Suisse, notamment, ont en effet été gérées par des cessions d’activité, en marge de la résolution pour la seconde.

Enfin, la résolution reste le seul outil de gestion de crise harmonisé dont nous disposons, au-delà des frontières de l’Europe, mais cette coordination internationale est limitée à ce jour aux banques systémiques mondiales (GSIB). Les récents évènements nous amènent à penser que davantage de banques, y compris de petite et moyenne taille, devraient s’y préparer. Au niveau international, c’est le Conseil de Stabilité Financière (FSB Financial Stability Board) qui identifie les banques systémiques en comparant la taille, l’activité internationale, les interconnexions et la substituabilité des grandes banques. Mieux préparer la résolution doit passer par un examen des standards internationaux développés par le FSB notamment afin d’évaluer s’il conviendrait d’imposer la constitution de capacité d’absorption des pertes (à travers l’émission de dettes) à davantage de banques. Cette possible extension se retrouve aussi dans la récente proposition de la Commission européenne relative à un cadre révisé pour la gestion des crises et l’assurance des dépôts (CMDI).

En conclusion, je voudrais tirer trois enseignements de cette revue rapide de l’évolution de notre situation économique et financière :

  • La bonne capacité de résistance aux chocs de notre économie et de notre système financier jusqu’à présent ;
  • Le changement de régime de l’environnement des taux d’intérêt que ces chocs ont provoqué en nécessitant, pour juguler une inflation qui est devenue trop élevée après avoir été longtemps trop basse, une normalisation de la politique monétaire ;
  • L’importance, pour maintenir la stabilité financière, objectif pour lequel la Banque de France est résolument engagée, de continuer à apprendre de chaque épisode de stress sur le secteur financier, et d’en tirer des leçons en termes de déploiement et d’application homogène ou encore de perfectionnement des standards.

Ces leçons à tirer en matière de régulation du système bancaire ne doivent pas pour autant nous détourner de la nécessité de renforcer également le cadre de régulation du secteur financier non bancaire, mise en évidence par les chocs générés en 2020 suite aux mesures de confinement liées à la pandémie de Covid 19, et plus récemment, en 2022, la faillite du Family office Archegos ou encore les problèmes rencontrés par les fonds de pension du Royaume-Uni en 2022.

Je vous remercie de votre attention.

 

1 Le montant total de ces mesures à destination des ménages pourrait atteindre ainsi environ 50 milliards d’euros en 2023.

2 Les résultats du dernier Bank Lending Survey illustrent ce point.