L’essor de l’intégration financière européenne après le passage à l’euro
Le passage à la monnaie unique change l’échelle des flux financiers, du fait notamment de la suppression du risque de change. Après des directives sectorielles isolées dans les années 1980 et 1990, l’introduction de l’euro s’accompagne du Financial Services Action Plan, plan global destiné à favoriser les échanges financiers intra-communautaires (cf. schéma). Comprenant 27 directives mises en œuvre de 1999 à 2007, il contribue directement à l’accélération des flux intra-zone euro en harmonisant le cadre réglementaire (Kalemli-Ozcan et al., 2010).
L’intégration financière des années 2000 est alors principalement portée par les investissements directs et de portefeuille sortants. Les flux de la France vers l’UE atteignent ainsi 18% du PIB en 2007, en particulier vers l’Allemagne, les Pays-Bas et le Royaume-Uni (principalement en investissements directs), tandis que l’intégration vis-à-vis du reste du monde hors UE stagne autour de 9% (graphique 1). Les flux de portefeuille français vers les pays du Sud de l’Europe (Espagne, Italie, Grèce, Portugal) et l’Irlande s’amplifient également, dans un contexte d’accroissement des déséquilibres internes à ces pays. La composition des flux français vers l’UE est profondément modifiée avec une forte progression de l’acquisition de dettes (investissements de portefeuille en titres de créances et des autres investissements, graphique 3). Ces flux sortants sont financés, en retour, par des flux entrants d’investissements de portefeuille et d’autres investissements (principalement des prêts interbancaires) provenant de pays extérieurs à la zone euro qui atteignaient 18% du PIB en 2004. La France joue ainsi un rôle d’intermédiaire des flux de financement entre le reste du monde et la zone euro.
La décennie des crises : la grande crise financière et la crise de la zone euro
Sous l’effet de la crise financière de 2008 et de la crise de la dette européenne en 2010-2012, les flux financiers français sortants se rétractent provisoirement avec des désinvestissements en 2008 pour les autres investissements et en 2011 pour les investissements de portefeuille. Le recul des flux intra-européens s’explique principalement par la réduction de la taille du bilan des banques et le repli des prêts interbancaires (Emter et al. 2018), auxquels se sont substitués les prêts directs de l’Eurosystème aux banques (via la politique d’appels d’offre intégralement servis).
Suite à la crise de la zone euro, on observe également une forte réduction des expositions aux titres de créances émis par le reste de l’UE. Du fait de l’initiation d’un cercle vicieux, la défiance vis-à-vis des dettes publiques s’est étendue aux banques qui détenaient une part importante de titres publics nationaux. Les détentions transfrontières de titres de créance, notamment publiques, au sein de la zone euro ont ainsi été réduites après le déclenchement de la crise grecque (de Haan et Vermeulen 2018).
Depuis 2000, les acquisitions de dettes fluctuent davantage que les acquisitions de capital (IDE et actions) dans le reste de l’UE. Comme dans le reste du monde, les flux d’IDE sont plus résilients, particulièrement dans les périodes de crise.