Ainsi, la hausse parallèle du taux d’exportation explique une part importante de la croissance du taux de pénétration puisque les exportations incorporent beaucoup de valeur ajoutée étrangère (environ 30 % en France, cf. Cezar 2016). Ensuite, du fait de la globalisation, la croissance de l’offre de biens et services, en quantité comme en variété, a été plus forte dans le reste du monde qu’en France ou en Allemagne.
Ces mécanismes sont en partie capturés dans les indicateurs de prix des importations (hors énergie) et des exportations de biens. L’offre nouvelle de biens échangeables limite la croissance des prix des produits importés par la France. Nous estimons ainsi une équation d’importations dans laquelle l’élasticité à la demande est unitaire à long terme (1 % de demande supplémentaire conduit à 1 % d’importations supplémentaire) et la croissance tendancielle du taux de pénétration est liée à l’évolution des prix relatifs des importations (hors énergie) par rapport aux exportations.
Rôle-clé de la composition de la demande, surtout à court terme
Certaines composantes de la demande, les plus volatiles, ont un plus fort contenu en importations. L’investissement des entreprises ou la consommation de biens durables (automobile mais plus encore informatique et électronique) sont à la fois très pro-cycliques et génèrent beaucoup d’importations. A l’opposé, la consommation de services des ménages pèse plus dans la demande intérieure mais est moins volatile et engendre moins d’importations (Bussière et al 2011).
Une mesure appropriée de la demande dans le cadre d’une équation d’importations pondère donc ses composantes en tenant compte de leur contenu en importations, direct mais aussi indirect. La production domestique d’un bien ou service peu importé peut en effet nécessiter beaucoup d’intrants importés. C’est un indicateur de ce type que nous utilisons dans notre équation. Il ressort avec une élasticité unitaire à long terme mais très supérieure à l’unité à court terme. Cette forte élasticité à court terme s’explique notamment par la très forte pro-cyclicité des stocks qui ont un contenu élevé en importations.
0,33 euro de hausse des importations pour 1 euro de demande en plus
Le graphique 1 compare les importations totales observées (en volume) et celles prévues par l’équation traduisant les mécanismes précédents. L’équation estimée capte les inflexions des importations sur l’ensemble de la période, tout en ayant une élasticité unitaire à la demande. Celle-ci signifie qu’à moyen terme, sous l’hypothèse d’une stabilité de la part des différentes composantes de la demande et des prix relatifs à l’importation et à l’exportation, la fuite vers les importations est en réalité du même ordre que la part des importations dans le PIB (environ 33 %) : une hausse de la demande de 1 euro se traduit in fine par une hausse des importations de 0,33 euro et donc une hausse de 0,67 euro de la valeur ajoutée produite en France. Les chocs positifs de demande d’importations ne semblent pas augmenter les importations en augmentant les prix relatifs français.
Une part des importations restant cependant inexpliquée en 2016
Le dynamisme des importations en 2014 et 2015 n’est donc pas en contradiction avec ces comportements. Cette période est également caractérisée par un rattrapage d’une période faible en importations, jusqu’au début 2013, liée notamment à la faiblesse de la consommation des ménages en biens manufacturés.
Néanmoins, en 2016, une part des importations observées reste mal simulée via les comportements usuels. Plusieurs éléments à surveiller pourraient contribuer à cet écart :
- Le dynamisme des importations de matériel de transport, notamment aéronautiques, n’a pas eu la contrepartie attendue en exportations.
- L’augmentation des importations agricoles peut être expliquée par la faiblesse de la production nationale, largement liée aux conditions climatiques.
- Les stocks, qui sont parfois destinés à l’exportation comme ceux de l’industrie aéronautique, se sont aussi beaucoup accrus depuis 2013, contribuant à la croissance des importations.
Cette part inexpliquée pourrait donc être seulement temporaire.