Discours

Vœux 2023

Intervenant

François Villeroy de Galhau intervention

François Villeroy de Galhau, Gouverneur de la Banque de France

5 Janvier 2023
François Villeroy de Galhau intervention

Discours de François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France, Président de l’ACPR.

Permettez-moi de vous présenter mes vœux les plus chaleureux pour l’année 2023 au nom de la Banque de France et de l’ACPR.

Je ne sais si j’ose vous souhaiter, nous souhaiter, une année sans chocs après ceux de 2020, 2021, 2022. L’année écoulée a marqué un climat d’incertitude exacerbé par la guerre russe en Ukraine et la crise énergétique. Elle a induit aussi une volatilité accrue sur les marchés financiers, doublée de vives secousses dans la sphère des crypto-actifs. Dans ce contexte perturbé, je formulerai deux doubles vœux pour 2023 :

1) Moins d’inflation, et plus de stabilisation. L’activité est jusqu’ici plus résiliente que prévu, et tant mieux ; l’inflation ne doit pas cependant devenir persistante. Elle constitue la première préoccupation des Français, la vaincre est notre première mission. Elle a baissé en décembre à 6,7%, ce qui est encourageant mais pas suffisant. Elle atteindrait son pic au 1er semestre, puis diminuerait vers 4% à la fin de cette année. Mais notre prévision, et notre engagement, c’est de ramener cette inflation vers 2% d’ici fin 2024 à fin 2025. Pour cela, après avoir atteint en décembre un niveau proche du « taux d'intérêt neutre » à 2%, nous entamons la deuxième phase vers la stabilisation monétaire : il serait souhaitable d’atteindre le bon « taux terminal » d’ici l’été prochain, mais il est trop tôt pour préjuger de son niveau. Nous devrons rester pragmatiques et guidés par les données observées y compris de l’inflation sous-jacente, sans fétichisme des hausses trop mécaniques. Nous serons prêts ensuite à rester à ce taux terminal le temps nécessaire : la course de vitesse des hausses de taux en 2022 devient plutôt une course de fond, et la durée comptera au moins autant que le niveau.

Nous veillerons en parallèle à garantir le maintien de la stabilité financière, appuyée sur la résilience forte des banques et des compagnies d’assurance françaises. 2023 doit être en Europe l’année de la transposition de Bâle 3, et de la conclusion de la revue de Solvabilité 2. Sur les crypto-actifs, tous les désordres de 2022 nourrissent une conviction simple : il est souhaitable que la France passe dès que possible à l’agrément obligatoire des PSAN (prestataires de services sur actifs numériques) plutôt qu’à leur simple enregistrement. Et ce bien avant l’entrée en application de MiCA pour instaurer un cadre de confiance nécessaire.

2) Moins de protection, et plus d’adaptation. L’État peut amortir temporairement le choc énergétique, mais pas le faire disparaître. Ce n’est pas seulement un mauvais moment à passer, c’est une nouvelle donne économique à laquelle nous devons nous adapter. Il faut donc progressivement, et d’ici deux à trois ans, ramener vers zéro les subventions budgétaires à l’énergie. Et répartir plus efficacement la facture entre entreprises et ménages, en veillant à l’équité envers les ménages – par des mesures mieux ciblées vers les plus touchés – mais tout autant à la compétitivité des entreprises. À terme, la clé est bien sûr tout ce qui musclera notre capacité productive par les trois grandes transformations de l’offre : la transformation énergétique en premier lieu ; la transformation numérique ; et la transformation du travail, qui doit être à la fois plus abondant et plus qualifié. Notre croissance y gagnera, et notre inflation en sera mieux maîtrisée. Pour y revenir en résumé : l’arme de la victoire durable contre l’inflation n’est pas budgétaire, elle est d’abord monétaire et ensuite structurelle.