Résultats de l’enquête d’octobre 2023 sur la distribution du crédit bancaire dans la zone euro

•    Les critères d’octroi se sont encore durcis, plus que ne l’avaient prévu les banques, pour l’ensemble des catégories de prêt
•    La demande de prêts des entreprises et des ménages a continué de diminuer fortement
•    La réduction en cours du bilan des banques centrales contribue au durcissement des conditions d’attribution des prêts
•    L’impact positif du relèvement des taux directeurs sur les marges d’intérêt nettes devrait s’estomper progressivement
 

Selon l’enquête d’octobre 2023 sur la distribution du crédit bancaire dans la zone euro, les critères d’octroi – c’est-à-dire les directives internes des banques ou leurs critères d’approbation des prêts – se sont encore durcis pour les prêts ou lignes de crédit aux entreprises au troisième trimestre 2023 (pourcentage net de banques ressortant à 12 %, après 14 % au deuxième trimestre 2023 ; graphique 1). Depuis 2022, le durcissement net cumulé a été considérable, ce qui est en ligne avec l’affaiblissement significatif en cours de la dynamique des prêts. Le pourcentage net de banques faisant état d’un durcissement a légèrement diminué par rapport au trimestre précédent, mais est légèrement plus élevé que ce que les banques avaient prévu au trimestre précédent. Les banques ont également fait état d’un nouveau durcissement net de leurs critères d’octroi pour les prêts au logement consentis aux ménages et les crédits à la consommation et les autres prêts aux ménages (pourcentages nets de 11 % et 16 %, respectivement). Dans les deux cas, ces chiffres ont nettement dépassé les anticipations précédentes. Pour les prêts au logement, le rythme du durcissement net s’est même redressé par rapport au deuxième trimestre, tandis qu’il s’est modéré légèrement pour les crédits à la consommation et les autres prêts. Une perception plus élevée des risques en lien avec les perspectives économiques et la situation propre aux emprunteurs, une moindre tolérance au risque et des positions de liquidité des banques moins élevées ont contribué au durcissement. Pour le quatrième trimestre 2023, les banques de la zone euro s’attendent à un nouveau durcissement net, quoique plus modéré, des critères d’octroi pour les prêts aux entreprises, et à une situation globalement inchangée en ce qui concerne les critères d’octroi pour les prêts au logement consentis aux ménages. Pour les crédits à la consommation, les banques de la zone euro prévoient un nouveau durcissement net significatif. 

Au troisième trimestre 2023, les modalités et conditions générales pratiquées par les banques – qui correspondent aux modalités et conditions effectives convenues dans les contrats de prêt – se sont encore durcies pour toutes les catégories de prêts. L’élargissement des marges sur les prêts a été le principal déterminant du durcissement net, reflétant la transmission en cours de taux de marché plus élevés aux taux des prêts accordés aux entreprises et aux ménages. 

Les banques ont de nouveau fait état d’une baisse nette substantielle de la demande de prêts des entreprises ou des tirages sur les lignes de crédit au troisième trimestre 2023 (graphique 2), ainsi que d’une baisse de la demande de prêts au logement et de la demande de crédits à la consommation et autres prêts aux ménages. Comme au cours des derniers trimestres, la diminution de la demande nette a été bien plus marquée que ce que les banques avaient prévu, principalement en raison de la hausse des taux d’intérêt, ainsi que d’un investissement fixe plus faible pour les entreprises, d’un recul de la confiance des consommateurs et d’une détérioration des perspectives sur le marché immobilier pour les ménages. Le pourcentage net des banques faisant état d’une baisse de la demande a été plus contenu qu’au cours des derniers trimestres, qui ont enregistré des points bas historiques depuis le début de l’enquête en 2003. Pour le quatrième trimestre 2023, les banques anticipent une nouvelle diminution nette de la demande sur l’ensemble des catégories de prêts, bien moins prononcée toutefois qu’au troisième trimestre.

D’après les banques interrogées, au troisième trimestre 2023, l’accès au financement s’est détérioré dans tous les compartiments de marché, en particulier pour l’accès au financement de détail. La détérioration prononcée de l’accès au financement de détail − en particulier le financement à court terme − reflète la concurrence accrue pour la liquidité provenant d’autres banques et d’autres possibilités d’investissement qui offrent une rémunération plus élevée.

S’agissant de la réduction du bilan, les banques ont déclaré que la réduction, par la BCE, de son portefeuille d’actifs lié à la politique monétaire – y compris par l’arrêt des réinvestissements du produit des titres arrivant à échéance achetés dans le cadre du programme d’achats d’actifs de la BCE (asset purchase programme, APP) – a contribué à une détérioration des conditions de financement de marché et des positions de liquidité pour les banques de la zone euro au cours des six derniers mois. Ce phénomène a contribué au durcissement des conditions d’attribution des prêts, avec un effet de durcissement net sur les modalités et conditions et un impact négatif sur les volumes de prêts bancaires dans l’ensemble des catégories de prêts. Ces effets devraient se renforcer au cours des six prochains mois.

Les banques de la zone euro ont indiqué que l’arrêt progressif de la troisième série d’opérations de refinancement à plus long terme ciblées (TLTRO III), dont les fonds sont arrivés à échéance ou ont fait l’objet de remboursements anticipés volontaires, a eu un impact négatif sur leurs positions de liquidité et leurs conditions de financement au cours des six derniers mois. Cela a entraîné un léger effet de durcissement sur les modalités et conditions appliquées par les banques et une pression à la baisse sur les volumes de prêts. Cette pression à la baisse devrait s’intensifier au cours des six prochains mois.

Les banques de la zone euro ont déclaré que les taux directeurs de la BCE ont continué d’avoir un impact largement positif sur leurs marges nettes d’intérêts au cours des six derniers mois, même s’il devrait s’estomper progressivement au cours des six prochains mois. Alors que les banques ont déclaré un impact positif sur leur rentabilité globale, la part des banques faisant état d’un impact négatif sur les volumes de prêts des décisions de la BCE relatives aux taux d’intérêt a fortement augmenté, en ligne avec l’affaiblissement significatif de la dynamique des prêts. De plus, les banques ont fait état d’un nouvel impact négatif via l’augmentation des besoins de provisionnement et des dépréciations.

L’enquête sur la distribution du crédit bancaire dans la zone euro, qui est réalisée quatre fois par an, a été mise au point par l’Eurosystème afin de mieux comprendre le comportement des banques en matière de prêt dans la zone euro. Sauf indication contraire, les résultats présentés dans l’enquête d’octobre 2023 portent sur les évolutions observées au troisième trimestre 2023 et sur les changements attendus au quatrième trimestre 2023. La campagne d’octobre 2023 a été réalisée entre le 15 septembre et le 2 octobre 2023. Au total, 157 banques ont été interrogées pour cette enquête, avec un taux de réponse de 100 %.