Enquête mensuelle de conjoncture

Enquête mensuelle de conjoncture – Début mai 2024

Mise en ligne le 14 Mai 2024

La Banque de France publie des enquêtes de conjoncture : un diagnostic sur l’économie française, sous la forme d’indicateurs de climat des affaires et de prévisions à court terme. L’enquête mensuelle de conjoncture, chaque début de mois, décrit la situation conjoncturelle du mois précédent et prévoit le PIB trimestriel, grâce aux réponses de 8 500 dirigeants d’entreprise.

Selon les chefs d’entreprise participant à notre enquête (environ 8 500 entreprises ou établissements interrogés entre le 26 avril et le 6 mai), l’activité a progressé en avril dans les services marchands, et plus sensiblement qu’anticipé le mois dernier dans l’industrie et le bâtiment, à la faveur notamment d’un rattrapage après un mois de mars en retrait et en vue d’un mois de mai au ralenti en raison des congés et fermetures liés au positionnement des jours fériés. D’après les anticipations des entreprises pour mai, l’activité est en effet attendue en repli dans l’industrie et le bâtiment, et évoluerait peu dans les services. Ces anticipations sont toutefois à interpréter avec prudence compte tenu des effets de calendrier. Les carnets de commandes restent jugés dégradés dans quasiment tous les secteurs de l’industrie, à l’exception notable de l’aéronautique ; dans le gros œuvre du bâtiment, ils demeurent
très en retrait par rapport à la période pré-Covid en raison de la morosité du marché de la construction de logements neufs.

La modération des prix de vente se poursuit. Selon les industriels, les prix des matières premières continuent de diminuer bien que plus légèrement. Dans l’industrie et le bâtiment, la proportion d’entreprises ayant augmenté leurs prix ce mois-ci (respectivement 6 % et 2 %) se situe un peu en dessous de leurs niveaux des mois d’avril d’avant Covid. Parallèlement, la proportion de celles indiquant des baisses de prix (respectivement 5 % et 8 %) est supérieure à celle d’avant-Covid. Dans les services marchands, la proportion d’entreprises indiquant une hausse de leurs prix (12 %) ne s’est pas encore complètement normalisée.

Les difficultés de recrutement poursuivent leur lent repli, à un niveau encore élevé : 38 % des entreprises les mentionnent en avril (après 39 % en mars).

Sur la base des résultats de l’enquête, complétés par d’autres indicateurs, nous estimons que le PIB progresserait légèrement au deuxième trimestre 2024, après une hausse de + 0,2 % au premier trimestre.

Cette prévision reste toutefois encore très préliminaire, en raison des spécificités du calendrier de ce mois de mai et du changement de base à venir (31 mai) des comptes nationaux publiés par l’Insee.

1. En avril, l’activité progresse l’activité progresse dans l’industrie, les services marchands et le bâtiment

En avril, l’activité progresse dans l’industrie, à un rythme nettement plus élevé que ce qui avait été anticipé par les chefs d’entreprise le mois dernier. Les chefs d’entreprise mettent en avant un effet de rattrapage en mars et l’anticipation d’un mois de mai avec une activité moindre prévue en raison des congés et fermetures liés au positionnement des jours fériés. La hausse en avril concerne à la fois l’agro-alimentaire, les biens d’équipement
et les matériels de transport. De manière plus détaillée, la progression est soutenue pour les produits informatiques, électroniques et optiques, les équipements électriques, l’aéronautique, la chimie ainsi que les autres produits industriels. À l’opposé, les produits en caoutchouc, plastique sont en repli, dans la poursuite de la tendance observée en mars. 

Le TUC (taux d’utilisation des capacités de production) pour l’ensemble de l’industrie augmente légèrement, à 76,4 %, et reste proche de sa moyenne sur 15 ans (77 %). L’indicateur croît notamment dans l’habillement, textile, chaussures, et l’automobile (+ 2 points).

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Taux d'utilisation des capacités de production
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Note de lecture : Le solde d’opinion sur l’évolution de l’activité (qui mesure la différence entre les proportions d’entreprises ayant déclaré une hausse de l’activité et celles ayant déclaré une baisse au cours du mois passé) s’établit pour avril à 7 points dans l’industrie. Pour mai (barre rouge), les chefs d’entreprise dans l’industrie anticipent une baisse de l’activité (– 7 points).

Les stocks de produits finis sont en légère progression en avril, en partie pour anticiper la moindre production prévue en mai. Ils augmentent notamment dans l’aéronautique, les machines et équipements et l’habillement, textile, chaussures. Ils restent à des niveaux jugés élevés, et supérieurs à leur moyenne de long terme dans la plupart des secteurs dont l’aéronautique, la pharmacie et les machines et équipements.

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Situation des stocks de produits finis dans l'industrie

Dans les services marchands, l’activité continue de progresser en avril, à un rythme plus élevé que ce qui avait été anticipé par les chefs d’entreprise le mois dernier. Cette progression concerne l’ensemble des services aux entreprises (en particulier l’édition, les activités juridiques et comptables, de conseil de gestion, et la publicité et études de marché), alors que l’activité recule dans les services aux particuliers, en raison notamment d’une météo défavorable (activités de loisirs et services à la personne, hébergement, restauration). Enfin, le travail temporaire progresse.

Dans le bâtiment, l’activité progresse en avril, là aussi davantage qu’anticipé le mois dernier, tant dans le gros œuvre que dans le second œuvre, par anticipation d’un mois de mai en net retrait.

Les soldes d’opinion sur la situation de trésorerie évoluent globalement peu dans l’industrie. La trésorerie est jugée satisfaisante dans la pharmacie, l’industrie agro-alimentaire et la chimie, mais particulièrement basse dans les produits en caoutchouc, plastique, l’automobile, l’habillement-textile-chaussures, la métallurgie ainsi que le bois-papier-imprimerie.

Dans les services marchands, le solde d’opinion sur la situation de trésorerie remonte légèrement. Elle est jugée satisfaisante dans les activités d’ingénierie, l’édition, les services d’information, les activités comptables et juridiques, tandis qu’elle reste considérée basse dans la publicité, études de marché et la restauration.

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Situation de trésorerie a) Dans l’industrie b) Dans les services marchands

2. En mai, selon les anticipations des entreprises, l’activité évoluerait peu dans les services marchands et se replierait dans l’industrie et dans le bâtiment, en raison notamment d’effets de calendrier

Pour le mois de mai, selon les chefs d’entreprise de l’industrie, l’activité baisserait nettement, en raison des ponts et congés liés au positionnement des jours fériés. Les soldes d’opinion de l’enquête sont certes corrigés du nombre de jours ouvrables, mais cette correction ne prend pas en compte le positionnement des jours fériés, qui peut affecter le nombre de jours effectivement travaillés. Les machines et équipements, l’habillement, textile, chaussures, la métallurgie, ainsi que le bois, papier, imprimerie seraient ainsi en net recul sur ce mois. Seule l’aéronautique progresserait.

Dans les services, l’activité évoluerait globalement peu, mais afficherait des tendances hétérogènes entre secteurs. L’hébergement, la restauration et la location automobile progresseraient à la faveur des congés, de même que certains services aux entreprises (édition, activités juridiques et comptables et de conseil en gestion), alors que la réparation automobile, les services à la personne, le travail temporaire et la programmation conseil seraient en repli.

Enfin, dans le bâtiment, l’activité se contracterait fortement tant dans le gros œuvre que le second  œuvre. Au-delà du mois de mai, très atypique, les chefs d’entreprise du second œuvre indiquent être globalement pessimistes sur l’ensemble de l’année, dans le sillage du gros œuvre.

L’opinion sur la situation des carnets de commandes dans l’industrie est légèrement moins dégradée qu’en mars, et ce, pour tous les secteurs, à l’exception des machines et équipements. La situation est jugée sous sa moyenne de long terme dans tous les secteurs, sauf pour l’aéronautique et les produits informatiques, électroniques et optiques.

Dans le bâtiment, le jugement sur les carnets de commandes baisse de nouveau dans le second œuvre et reste très dégradé dans le gros œuvre, malgré une légère inflexion.

Notre indicateur mensuel d’incertitude, construit à partir d’une analyse textuelle des commentaires des entreprises interrogées, évolue peu par rapport à mars, quel que soit le secteur considéré.

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Situation des carnets de commandes a) Dans l'industrie b) Dans le bâtiment
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Note : La valeur de référence est fixée à 100 et correspond à la valeur autour de laquelle fluctue l’indicateur en période normale.

3. La modération des prix de vente se poursuit

En avril, les difficultés d’approvisionnement sont de plus en plus limitées dans l’industrie (10 % des entreprises les mentionnent, – 2 points par rapport à mars) ; dans les transports (automobile et aéronautique), un quart des
entreprises font néanmoins état de difficultés sur certains composants (par exemple les microprocesseurs), en lien avec les problèmes du transport maritime en mer Rouge, même si ces difficultés sont très en retrait par rapport aux plus hauts de 2022 : 28 % et 26 % respectivement en avril, à comparer à 87 % et 77 % en avril 2022. Les difficultés d’approvisionnement dans le bâtiment se font rares (6 %, après 7 % en mars).

Dans l’industrie, les prix des matières premières continuent d’être jugés en recul par les chefs d’entreprise, dans une moindre mesure toutefois par rapport à mars ; le solde d’opinion sur les prix de produits finis1 en avril reste également négatif, pour le deuxième mois consécutif. De même, dans le bâtiment, les prix des devis sont de nouveau jugés en baisse en avril par les chefs d’entreprise. En revanche, dans les services, le solde d’opinion reste encore un peu au-dessus de ses niveaux pré-Covid même s’il fléchit légèrement par rapport à mars.

De façon plus détaillée, la proportion des industriels déclarant avoir augmenté leurs prix de vente ce mois-ci s’établit à 6 %, légèrement en dessous des niveaux observés lors des mois d’avril de la période pré-Covid et très en dessous de celles du même mois de 2022-2023. À l’inverse, 5 % des industriels déclarent avoir baissé leurs prix de vente en avril. Les baisses de prix de produits finis concernent la chimie (17 %), l’agro-alimentaire (8 %), la fabrication de machines et équipements (7 %).

Dans le bâtiment, la proportion des chefs d’entreprise indiquant une hausse du prix des devis s’établit à 2 % seulement, une proportion inférieure à celles des mois d’avril de la période pré-Covid. Par ailleurs, 8 % des chefs d’entreprise déclarent avoir baissé leurs prix ce mois-ci, après 11 % en mars, mois qui a enregistré le pourcentage le plus élevé depuis plus de cinq ans.

Dans les services, la dynamique des prix ne s’est pas encore complètement normalisée. La proportion d’entreprises indiquant une hausse de leurs prix s’établit à 12 % – à comparer à 7 % environ pour les mois d’avril pré-Covid –, tandis que la proportion d’entreprises indiquant une baisse de leurs prix reste faible, à 3 %. La hausse des prix dans les services concerne principalement la publicité et études de marché, ainsi que le nettoyage.

Les anticipations des chefs d’entreprise pour mai indiquent que 6 % d’entre eux prévoient d’augmenter leurs prix dans l’industrie, 7 % dans les services marchands et 2 % dans le bâtiment.

Les chefs d’entreprise ont également été interrogés sur leurs difficultés de recrutement, qui continuent de se replier lentement en avril : 38 % des entreprises interrogées en font état, après 39 % le mois dernier.

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Évolution des prix de produits finis et des matières premières dans l'industrie
Évolution des prix de produits finis, par grand secteur
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Part des entreprises indiquant des difficultés de recrutement

4. Nos estimations suggèrent que l’activité serait en légère hausse au deuxième trimestre

Les premiers résultats des comptes trimestriels, publiés par l’Insee fin avril, ont établi que la croissance du PIB était de + 0,2 % au premier trimestre 2024, ainsi que nous l’avions prévu lors de notre dernier point de conjoncture. Le repli de l’activité dans les secteurs de la construction et de l’énergie a été compensé par une hausse de la valeur ajoutée dans les services marchands, alors que l’industrie s’est stabilisée par rapport au quatrième trimestre 2023.

Sur la base des informations de l’enquête mensuelle de conjoncture de la Banque de France complétée par d’autres données disponibles (indices de production et enquêtes de l’Insee, ainsi que données à haute fréquence), nous estimons que le volume du PIB connaîtrait une légère progression au deuxième trimestre.

Le PIB serait encore porté ce trimestre par les services marchands, grâce notamment au commerce, aux services aux entreprises et à l’information-communication.

La valeur ajoutée serait stable sur le trimestre dans l’industrie manufacturière en raison d’une baisse anticipée de la production en mai après une hausse lors du mois d’avril. L’activité dans le secteur de l’énergie rebondirait
légèrement ce trimestre après une forte baisse en début d’année. Enfin, l’activité dans la construction serait encore en diminution, en cohérence avec la baisse importante des mises en chantier de logements individuels et des carnets de commandes dégradés.

Il convient de souligner que la prévision de l’évolution du PIB au deuxième trimestre est entourée d’une incertitude plus large qu’habituellement en raison du positionnement des jours fériés en mai. En outre, nous ne disposons pas encore des comptes nationaux en nouvelle base qui seront publiés le 31 mai par l’Insee, sur lesquels seront recalés les comptes trimestriels (y compris le premier trimestre 2024).

 

Le solde d’opinion est la différence des proportions de hausses et de baisses, pondérées par l’intensité de la variation (trois modalités possibles dans l’enquête mensuelle de conjoncture : faible, normale, élevée). Un chef d’entreprise indiquant une forte hausse de ses prix, toutes choses égales par ailleurs, contribuera davantage au solde d’opinion qu’un chef d’entreprise indiquant une faible hausse.

Mise à jour le 14 Mai 2024