Paris, 21 décembre 2017
Mesdames et Messieurs,
Je suis très heureux de vous accueillir à la Banque de France pour cette conférence organisée à l’occasion des 20 ans du label Finansol et consacrée à ce beau thème de l’innovation financière au service de la solidarité. Nous avons déjà eu le plaisir d’organiser une conférence avec Finansol ici-même en avril dernier, et je me réjouis de vous accueillir de nouveau aujourd’hui pour cet anniversaire que nous souhaitons marquer particulièrement. En effet, le label Finansol, qui est le premier label de finance éthique à avoir été créé en France, a joué un rôle important dans le développement de la finance solidaire, en rassurant les épargnants et en contribuant à donner de la notoriété à ce type de financement. Le label a, par ailleurs, accompagné et soutenu de nombreuses innovations à caractère solidaire comme le capital citoyen solidaire, l’épargne de partage ou encore les fonds solidaires dits « 90-10 ». Le succès grandissant de la finance solidaire et son utilité apparaissent très nettement dans les données du Baromètre 2017 de la Finance solidaire produites par l’association Finansol : environ un million d’épargnants français investissent aujourd’hui dans des produits solidaires, tandis que l’encours de finance solidaire a atteint 10 milliards d’euros fin 2016, après 15 années consécutives de hausse. En permettant d’investir dans des projets collectifs à forte utilité sociale ou environnementale, ce mode de financement a permis de créer ou consolider 49 000 emplois et de reloger 5 500 personnes en 2016.
La Banque de France n’est bien évidemment pas insensible aux progrès de la finance solidaire. Cette question fait largement écho à notre engagement social en tant qu’institution publique agissant au service de l’intérêt général. L’engagement social fait partie de nos valeurs et de notre ADN depuis de nombreuses années. L’année dernière, nous avons décidé d’aller encore plus loin : dans notre plan stratégique Ambitions 2020, nous avons choisi d’affirmer notre responsabilité sociale d’entreprise (RSE) autour de quatre engagements clairs, avec des exigences de résultat ambitieuses : un engagement économique et citoyen, un engagement éducatif et culturel, un engagement environnemental et un engagement vis-à-vis de nos collaborateurs. Ces quatre engagements se déclinent très concrètement en 11 actions prioritaires. Chacune d’elles est appuyée par un « sponsor » de haut niveau clairement identifié au sein de la Banque de France, et comporte des indicateurs chiffrés pour mesurer nos progrès. Ce matin, je vais dans un premier temps m’attarder sur celui de nos quatre grands engagements dont les enjeux sont les plus proches de ceux de la finance solidaire : notre engagement économique et citoyen, au service des entreprises et des particuliers. Puis, je présenterai quelques-unes des actions que nous menons au titre des trois autres engagements de RSE que nous avons pris en faveur de l’éducation, de l’environnement et de nos collaborateurs.
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Les actions que nous menons dans le cadre de notre engagement économique et citoyen visent d’abord à soutenir le dynamisme des entreprises et des territoires. Ces actions s’inscrivent dans le cadre notre mission de services à l’économie qui est l’une de nos trois grandes missions aux cotés de la stratégie monétaire et de la stabilité financière. Pour cela, la Banque de France prend appui sur son réseau d’implantations territoriales afin d’intervenir au plus près des entreprises, notamment les PME et les TPE qui constituent une grande part des entreprises du secteur de l’économie sociale et solidaire. Ainsi, depuis septembre 2016, la Banque de France a mis en place un réseau de 102 correspondants TPE départementaux chargés d’accueillir les dirigeants de TPE, de les conseiller et de les orienter vers les services et réseaux professionnels les plus adaptés à leurs besoins de financement ou de conseil. Un peu plus d’un an après la mise en place du dispositif, plus de 2000 TPE ont été accompagnées. De plus, la Banque de France agit en faveur des entreprises en réalisant la cotation de 250 000 d’entre elles, qui réalisent plus de 750 000 euros de chiffre d’affaires. Ceci facilite l’accès au crédit à de nombreuses PME et TPE. Depuis 3 ans, nous intégrons également des critères RSE dans notre cotation, car nous sommes convaincus que la prise en compte des aspects environnementaux et sociaux contribue à la résilience des entreprises.
La Banque de France œuvre également en faveur des personnes en situation de fragilité financière. Au titre de la mission qui lui a été confiée par l’État, la Banque de France agit pour prévenir et traiter le surendettement : nous résolvons ainsi environ 200 000 situations de surendettement par an et nous nous sommes fixé pour objectif chiffré de faire baisser le taux de redépôts de dossier à 37 % d’ici à 2020. Par ailleurs, la Banque de France s’est résolument engagée à favoriser le microcrédit, en raison de l’importance de ce type de financement comme facteur d’inclusion sociale et économique. Nous avons mis en place une collecte spécifique de données statistiques sur le microcrédit, qui éclairent les travaux de l’Observatoire de l’inclusion bancaire, dont j’assure la présidence. Elle permet de mesurer, quantitativement et qualitativement, la fragilité financière et l’effectivité des mesures qui doivent être déployées pour la réduire. Nous attribuons aussi régulièrement deux prix nationaux du microcrédit qui récompensent des parcours emblématiques de la contribution du microcrédit à la lutte contre les exclusions : la remise des prochains prix aura lieu au deuxième trimestre 2018. Cette année, pour renforcer encore le dialogue, nous avons également lancé les Rencontres régionales du microcrédit qui associent les acteurs publics, bancaires et associatifs du secteur. La Banque de France s’est fixé l’objectif – très ambitieux d’autant qu’il ne dépend pas que d’elle – que l’encours de microcrédits atteigne 2 milliards d’euros en 2020 contre 1,4 milliard en 2016 – voilà encore un autre indicateur chiffré.
Je vais désormais présenter – plus brièvement – les trois autres engagements que nous avons pris dans le cadre de notre stratégie RSE. Ces engagements, moins directement liés à nos missions premières, ont également trait à la solidarité, c’est pourquoi je tiens à les mentionner.
En premier lieu, nous avons pris un engagement éducatif et culturel. Dans ce cadre, la Banque de France agit notamment en faveur du renforcement de l’éducation économique, budgétaire et financière des publics qui est l’un des éléments du plan national de lutte contre la pauvreté. La Banque de France a été désignée fin 2016 opérateur pour la mise en œuvre de la stratégie nationale d’éducation financière. À ce titre, nous coordonnons l’ensemble des acteurs et des actions dans ce domaine. Nous avons ainsi mis en ligne dès janvier 2017 un portail pédagogique appelé « Mes questions d’Argent » qui, bien évidemment, fournit aussi des informations sur la finance solidaire. Déjà 300 000 pages du site ont été consultées depuis son ouverture et notre objectif est d’atteindre 700 000 pages vues par an d’ici à 2020. La convention nationale que nous avons signée en octobre dernier avec le Ministère de l’Éducation nationale participe également de notre ambition de sensibilisation de tous les publics, y compris les enseignants et les élèves. Dans la même logique, nous allons ouvrir fin 2018 à Paris le premier musée de l’économie et de la monnaie : « Citéco ».
Nous avons par ailleurs pris un engagement environnemental. Nous avons ainsi parmi nos objectifs de sensibiliser d’ici 2020 la quasi-totalité des établissements bancaires et d’assurance au risque climatique. En outre, dans le sillage du « One Planet Summit » qui s’est tenu à Paris le 12 décembre dernier, je tiens à souligner tout particulièrement les efforts de la Banque de France pour favoriser le développement de la « Finance verte ». À l'initiative de la Banque de France, huit banques centrales et autorités de supervision du monde entier mettent en place un « Réseau des superviseurs et des banques centrales pour le verdissement du système financier ». Ce réseau ambitionne de renforcer la réponse mondiale nécessaire pour respecter les objectifs de l'Accord de Paris et améliorer le rôle du système financier dans la gestion des risques et la mobilisation des capitaux en faveur des investissements verts et à faible émission de carbone. La première réunion sera organisée en début d’année prochaine, tandis qu’un état des lieux des travaux existants sera dressé dans le courant de l'année.
Enfin, nous avons pris un engagement vis-à-vis de nos collaborateurs. Il s’agit pour nous d’agir toujours plus en employeur responsable. Nous veillons par exemple à assurer la promotion de la parité et la diversité des profils et nous nous attachons également à favoriser le développement des compétences et l’évolution professionnelle, avec un objectif de délivrer 1200 certifications d’ici 2020.
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Pour la Banque de France comme pour Finansol, la solidarité n’est donc pas qu’un mot, c’est une ambition que nous nous attachons à promouvoir au quotidien. C’est pourquoi, nous tenions à accompagner Finansol dans cet anniversaire, qui n’est pas seulement l’occasion de faire un bilan, mais aussi une opportunité pour parler de l’avenir. À ce propos et en préambule de cette matinée d’échanges, je souhaiterais souligner les défis qui attendent la finance solidaire et le label Finansol. Ces défis sont parfaitement identifiés dans l’étude que vous publiez aujourd’hui : (i) accompagner davantage le développement des nouveaux fonds à impact social, (ii) labelliser des plateformes de financement participatif et (iii) porter le label Finansol à un niveau européen. La question de l’innovation financière demeure centrale et l’étude trace des perspectives très intéressantes pour les vingt prochaines années. Je vous souhaite à tous une excellente matinée. Je vous remercie de votre attention.
Contact presse : Clémence Choutet (01 42 97 74 51 ; clemence.choutet@banque-france.fr).